La déposition de Marouane El Bali était très attendue pour comprendre le fonctionnement et l'état d'avancement des projets d'attentat de cette cellule démantelée le 15 janvier 2015, une semaine après les attentats contre Charlie Hebdo, mais avant ceux du 13 novembre à Paris et de Bruxelles le 22 mars.
La cellule de Verviers était commandée, depuis la Grèce, par un jihadiste belgo-marocain notoire originaire du quartier bruxellois de Molenbeek, Abdelhamid Abaaoud, qui coordonnera quelques mois plus tard les attaques qui feront 130 morts à Paris.
"Je le sentais pas (...) quand j'ai compris qu'il y avait Abaaoud, quand j'ai vu ça, je me suis dit, je ne vais pas les aider", a assuré le prévenu, qui nie avoir fourni armes, faux papiers ou avoir entamé des démarches pour trouver un nouveau point de chute aux membres de la cellule.
M. El Bali est le seul à avoir survécu à l'assaut de la police contre un appartement du centre de Verviers (est), dans lequel se cachaient deux jihadistes soupçonnés par les enquêteurs de préparer un attentat "imminent", Soufiane Amghar et Khalid Ben Larbi. Certains des produits nécessaires pour fabriquer une bombe seront retrouvés dans la maison.
Les deux jihadistes sont morts les armes à la main après avoir ouvert le feu sur les policiers belges, appuyés par le GIGN français, pendant que M. El Bali se cachait, selon son récit, dans la salle de bains.
Revenant sur ses dénégations initiales, M. El Bali a reconnu pour la première fois avoir convoyé les deux hommes le 3 janvier jusqu'à Verviers: Soufiane Amghar depuis Aix-la-Chapelle en Allemagne, et Khalid Ben Larbi, depuis Lille en France.
Dans ce procès, qui doit durer jusqu'à la fin mai, un autre prévenu, Mohamed Arshad, a avoué avoir joué pendant deux mois le rôle de logisticien du groupe. Mais, repéré par la police, il était en passe, selon l'accusation, d'être remplacé dans cette fonction par M. El Bali, surnommé le "Gros", quand l'assaut a été lancé.
- "Je me dégonflais" -
Au téléphone, Amghar, un "ami proche" d'El Bali, le presse de faire fabriquer de faux papiers pour Abaaoud et évoque, dans un langage codé témoignant d'une extrême prudence, l'achat d'une arme pour 850 euros.
Confronté aux longs échanges avec Amghar révélés par les écoutes, El Bali a affirmé qu'il "baratinait" et qu'il comptait "couper les liens" après leur avoir rendu visite dans leur planque de Verviers le 15 janvier.
"Je n'ai pas voulu montrer que je me dégonflais, mais c'était vraiment du bluff", a-t-il affirmé devant le tribunal correctionnel de Bruxelles, où il est jugé avec 15 autres prévenus (dont neuf par contumace) pour avoir été l'un des "dirigeants d'une organisation terroriste".
"Personnellement je me suis dit qu'ils préparaient un braquage (...) peut-être qu'ils cherchaient à financer la cause (jihadiste), à envoyer de l'argent là-bas (en Syrie)", a-t-il expliqué, mais "je ne voulais pas les aider".
El Bali connaissait de vue Abaaoud, qui a grandi comme lui à Molenbeek, d'où sont originaires plusieurs des auteurs des attentats de Paris et de Bruxelles.
"C'était bonjour, au revoir, je ne le fréquentais pas", a-t-il dit. Début 2015, la réputation d'Abaaoud et ses méfaits en Syrie étaient déjà connus en Belgique, et encore mieux à Molenbeek où sa famille, des commerçants, tiennent plusieurs magasins.
"A l'époque, Abaaoud n'est pas encore la vedette tristement célèbre qu'il est devenu aujourd'hui, mais il est déjà passé à la télévision où on le voit charrier des cadavres (de soldats syriens exécutés par l'organisation Etat islamique) derrière son pick-up", a rappelé son avocat, me Sébastien Courtoy, interrogé par l'AFP.
M. El Bali "n'a pas voulu participer à ce projet que d'ailleurs il ne connaissait pas (...) et encore moins quand il a compris que M. Abaaoud était de la partie", a-t-il assuré.
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