"Si je gagne, ça vaudrait un film, c'est sûr", sourit auprès de l'AFP Merritt, depuis Doha, où s'ouvre vendredi la Ligue de diamant d'athlétisme.
248, c'est le nombre de jours qui se sont écoulés entre la transplantation qu'il a subie et sa participation au meeting qatari vendredi, qui symbolise son retour au plus haut niveau.
Une médaille d'or aux JO de Rio (5-21 août) constituerait l'un des plus beaux come-back de l'histoire du sport.
Sur le chemin qui lui reste à parcourir pour aller au Brésil, l'athlète de 30 ans se veut ambitieux, mais prudent.
"Faire partie de la sélection, ce serait déjà une énorme histoire, personne n'a jamais été transplanté d'un rein pour ensuite courir dans les 12 mois suivants", déclare-t-il. "Ce que je tente est quasiment l'impossible".
Ses problèmes de santé sont devenus tangibles lors des Mondiaux de Moscou, en 2013.
- Une maladie génétique rare -
Arrivé en bonne forme, Merritt se retrouve à batailler dès les séries, pour finalement prendre une décevante 6e place en finale.
"Je suis allé là-bas (Moscou) et je ne pouvais pas terminer ma course alors que je suis bon et un homme de championnats", déplore-t-il. "Je suis rentré à la maison et je suis tombé malade".
Il était, en fait, malade bien plus gravement qu'il ne l'imaginait.
Après une batterie de tests, on lui diagnostique une maladie génétique rare des reins: la glomérulosclérose segmentaire et focale. C'est à dire, comme le dit Merritt avec humour: "un nom bizarre, exagérément long".
Dans les faits, pourtant, cela n'a rien de drôle. Pour résumer, son système immunitaire attaque ses reins.
Dans un premier temps, Merritt pense que le mal est facilement traitable mais à mesure que sa santé décline, la transplantation devient la seule issue possible. Ses reins ne fonctionnent plus qu'à hauteur de 20%.
L'athlète fait cependant le choix de ne pas rendre public sa maladie, ouvrant la porte aux rumeurs.
"Je pensais que ce serait comme tout et que ça passerait avec le temps jusqu'à me permettre de retrouver un état normal", explique-t-il.
"Il y a eu des spéculations sur le fait que je prenais des produits, et que je ne courrais plus vite parce que j'avais justement arrêté de prendre ces produits. Mais je faisais face à des problèmes de vie, pas de dopage".
- Sa soeur donne son rein -
Sur la piste, Merritt renverse tout de même des montagnes, en décrochant une incroyable médaille de bronze aux Mondiaux de Pékin en 2015.
C'est durant ces championnats qu'il rend public sa maladie, et sa prochaine transplantation, quatre jours après la finale mondiale.
Sa soeur Latoya sera la donneuse. "Elle est venue me voir. Elle savait que j'avais besoin d'un rein. Il n'y avait aucun doute, aucune hésitation dans son esprit".
Merritt sera transplanté le 1er septembre 2015, et retrouve l'entraînement le 20 décembre, pour un cadeau de Noël anticipé.
Désormais, l'objectif Rio est lancé.
Merritt a calculé qu'il compte actuellement deux mois de retard sur son programme d'entraînement, qu'il doit adapter à l'actualité sanitaire.
Il a ainsi dû prendre des médicaments supplémentaires afin de se protéger du virus Zika.
"Chaque jour, j'ai un cocktail de pilules, en gros sept le matin, cinq le soir. Je suis sous immuno-dépresseur (pour éviter le rejet de la greffe) et ce sera le cas toute ma vie".
La semaine dernière, pour sa première course depuis l'opération, il a signé un 13 sec 61/100e, alors que son record du monde est de 12 sec 80/100e.
Il devra progresser à grande vitesse dans l'optique des sélections américaines, en juillet à Eugene (Oregon) où seuls les trois premiers obtiendront leur ticket.
"Je suis très confiant sur le fait qu'en juillet mon corps sera en très bonne forme, parce qu'en juillet c'est toujours le cas", explique Merritt.
Et une fois qualifié, Merritt ne se fixe aucune limite.
"Il n'y a jamais de limite, quand vous êtes aux JO, des choses extraordinaires arrivent".
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