Des survivants de cette tragédie, l'un des plus graves accidents de l'histoire industrielle mondiale, ont déposé dimanche matin des fleurs sur le site du complexe industriel, à Savar, près de Dacca.
Des proches des défunts, dont les corps de certains n'ont jamais été récupérés, ont récité des versets du Coran sur les lieux de la catastrophe.
"Trois années se sont écoulées et la justice n'est toujours pas passée", déplore le syndicaliste Abul Hossain. "Personne n'a été déclaré responsable de l'une des plus graves tragédies provoquées par l'homme."
En décembre, la justice avait confirmé l'inculpation pour meurtres de 41 personnes, parmi lesquelles le propriétaire du Rana Plaza, Sohel Rana.
Actuellement en détention, M. Rana est devenu l'ennemi public numéro un au Bangladesh lorsque des survivants ont raconté comment ils avaient été forcés à travailler par milliers en dépit des fissures apparues la veille sur les murs.
Cette tragédie avait montré au grand jour les conditions de travail déplorables des quatre millions d'ouvriers du secteur textile alors que le Bangladesh, deuxième plus grand exportateur mondial du secteur, fabrique à tour de bras des vêtements pour les distributeurs occidentaux.
Au moins 1.138 personnes ont péri dans la catastrophe. Les secouristes avaient passé des semaines à tenter de récupérer les corps dans les décombres. Plus de 2.000 personnes avaient été blessées, dont bon nombre ont été mutilées.
- "Rana à la potence" -
Des ouvriers ont également manifesté dimanche à Dacca, près d'un cimetière public où ont été enterrées des centaines de victimes non identifiées, pour demander que des condamnations tombent. "Rana à la potence", scandaient certains.
A Savar, où le site de la catastrophe a été transformé en un petit lac, certains demandaient aux autorités d'améliorer les mesures de sécurité dans les 4.500 usines textile du pays.
"Le gouvernement doit fermer toutes les usines en mauvais état pour éviter un nouveau Rana Plaza", déclarait un autre syndicaliste, Touhidul Islam.
Les exportations du secteur textile du Bangladesh représentent environ 25 milliards de dollars par an et l'habillement est le pilier de son économie.
De nombreux groupes, dont Benetton ou les chaînes de distribution Auchan, Mango, Primark ou Carrefour, ont été soupçonnés d'avoir sous-traité leur production à un moment ou à un autre au Rana Plaza.
L'affaire avait suscité l'indignation à travers le monde et mis la pression sur les marques européennes et américaines pour qu'elles fassent en sorte que les conditions de salaires et de sécurité soient améliorées.
Mais seule une fraction des usines du Bangladesh ont depuis lors reçu des certificats de conformité.
Les autorités ont achevé l'an passé le versement des indemnités aux 3.000 victimes. Mais leur montant est insuffisant, selon les survivants.
"J'ai touché 4.000 takas (45 euros) par mois pendant deux ans. Mais désormais, plus rien. Mon mari m'a quittée et je souffre de problèmes psychologiques", confie Swapna Bibi, 25 ans, qui est restée prisonnière des décombres pendant quatre jours.
Les pompiers se sont également réunis dimanche, rappelant les efforts qu'ils ont déployé pendant deux semaines.
"La mémoire des cris des victimes piégées me hante toujours", explique, en pleurs, Monir Hossein, un des soldats du feu.
"Je n'avais jamais vu de telles scènes de carnage. J'ai vu des ouvriers mourir les uns après les autres, coincés sous des débris", poursuit-il. "Cela m'a tellement bouleversé que j'ai dû être hospitalisé."
Certains brandissaient des photos des disparus.
"Tout ce que nous demandons au gouvernement, c'est de retrouver le corps de ma soeur pour que ma mère, qui est malade, puisse mourir en paix", déclare Lipy Begum dont la soeur Kulsum a péri à 16 ans dans le Rana Plaza.
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