"Il n'y a plus vraiment de place à l'erreur", affirme le chef économiste du Fonds monétaire international, Maurice Obstfeld, appelant à une action "immédiate" des gouvernements.
Ce regain de pessimisme a une traduction chiffrée. Après 3,1% en 2015, le produit intérieur brut (PIB) du globe ne devrait plus progresser que de 3,2% en 2016 et 3,5% en 2017, marquant un recul respectif de 0,2 et 0,1 point par rapport à janvier, selon les nouvelles projections du Fonds monétaire international qui tient son assemblée de printemps cette semaine à Washington.
Six ans après la crise financière, le FMI semble particulièrement préoccupé par le cocktail qui grippe l'économie mondiale: chute des cours des matières premières, difficile transition chinoise, coup de mou des marchés émergents et morosité dans les pays riches.
Une nouvelle récession planétaire n'est pas encore au programme mais elle semble roder et pourrait s'approcher dangereusement si l'activité continuait de se détériorer.
"Une croissance plus faible laisserait l'économie mondiale à la merci de nouveaux chocs et augmenterait les risques de récession", admet le FMI dans ce rapport semestriel.
- Transition chinoise -
Une fois encore, les pays émergents concentrent les inquiétudes avec des perspectives de croissance au plus bas depuis "deux décennies", selon l'institution de Washington.
La Chine devrait bien résister cette année (6,5% de croissance prévus) mais sa perte d'appétit pour les matières premières, couplée à la chute des cours du pétrole, se font durement sentir dans les pays qui les exportent, notamment en Afrique sub-saharienne (3,0% prévus en 2016).
Le FMI prévient par ailleurs que la transition de Pékin vers une économie davantage fondée sur la consommation pourrait être "moins douce" que prévu, au risque de créer de nouvelles turbulences financières.
D'autres grands pays émergents sont, eux, déjà dans le dur. Le Brésil, plongé dans une grave crise politico-financière, et la Russie, frappée par les sanctions liées à l'Ukraine, devraient ainsi s'enfoncer dans la récession cette année avec des contractions respectives de 3,8% et 1,8%, d'après ces nouvelles prévisions.
Les pays développés se portent mieux mais leur croissance s'est "ramollie" depuis la fin 2015 et l'héritage de la crise financière continue de "freiner la reprise", souligne le FMI.
Selon ses prévisions, le Japon devrait tomber en récession l'année prochaine tandis que la zone euro voit ses perspectives de nouveau assombries (1,5% en 2016) au moment où plane sur la région le spectre d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.
"Un +Brexit+ pourrait causer de graves dégâts régionaux et mondiaux", a prévenu M. Obstfeld, à deux mois et demi du référendum qui verra les Britanniques dire s'ils veulent quitter ou non l'Union européenne.
Selon le Fonds, ce scénario créerait "une période prolongée d'incertitude croissante qui pourrait peser lourdement sur la confiance et l'investissement".
- Nationalismes -
D'autres risques, moins économiques, pèsent par ailleurs sur la reprise. Conflits, crise des réfugiés, changement climatique, attaques terroristes et épidémies sanitaires peuvent avoir, "sans réponse" adéquate des autorités, d'importantes retombées sur l'activité mondiale, assure le FMI.
Déjà, note l'institution, les discours protectionnistes ont le vent en poupe en Europe mais également aux Etats-Unis, notamment par la voix du prétendant à la Maison Blanche Donald Trump.
"Une croissance plus faible renforce le mouvement de repli sur soi et en faveur de politiques nationalistes", estime M. Obstfeld.
Pour freiner cette tendance et relancer l'économie, le FMI exhorte ses Etats-membres à maintenir des politiques monétaires expansionnistes en Europe, au Japon et aux Etats-Unis et à mener des réformes "structurelles" notamment en allégeant le coût du travail.
Le sujet figurera sans aucun doute en tête de l'agenda des grandes puissances industrialisées et émergentes, qui se réunissent jeudi et vendredi à Washington pour un G20 Finances.
Un statu quo serait périlleux, martèle le FMI. "La perception d'une capacité limitée de réponse aux chocs (...) aggrave les inquiétudes", assure l'institution.
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