La présentation au Parlement européen de ce plan élaboré par le commissaire européen à la Fiscalité, le Français Pierre Moscovici, et son collègue chargé de la Stabilité financière, le Britannique Jonathan Hill, était prévue de longue date et survient après une consultation publique et une étude d'impact.
Mais elle tombe à point nommé après l'onde de choc mondiale provoquée par les révélations du Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) d'un système d'évasion fiscale à grande échelle.
"Je suis outragé et furieux de ce qui a été révélé (?) La fraude, l'évasion fiscale et l'optimisation fiscale agressive sont un fléau", se scandalisait M. Moscovici la semaine dernière devant des journalistes à Bruxelles.
Ce dernier doit d'ailleurs participer mardi après-midi à Strasbourg à un débat sur le sujet au Parlement avec des représentants du Conseil de l'UE.
Concrètement, la Commission doit présenter une nouvelle directive prévoyant de rendre publiques - "pays par pays" au sein de l'UE - les données comptables et fiscales des multinationales, soit leur chiffre d'affaires, leurs bénéfices, ainsi que l'assiette fiscale et les impôts payés dans les différents Etats membres.
"Dès lors qu'elles ont une filiale dans l'UE et un chiffre d'affaires d'au moins 750 millions d'euros, les entreprises, quelle que soit leur nationalité - européenne, mais aussi américaine, australienne, chinoise, etc. - auront l'obligation de publier ces éléments", a précisé M. Moscovici lundi dans le quotidien Le Parisien.
"Pour celles qui n'ont pas de filiale dans l'UE, nous demanderons les mêmes informations mais pour leur activité globale dans le monde entier en exigeant plus de détails pour leurs activités dans les pays qui seraient sur la liste des paradis fiscaux", a ajouté l'ex-ministre français des Finances.
Toutefois, cette proposition ne va pas assez loin pour nombre d'ONG qui réclament davantage de transparence. Ainsi l'ONG One déplore que seules les grandes entreprises (dont le chiffre d'affaires est supérieur à 750 millions d'euros) soient concernées par cette obligation de publier des informations de base.
- 'Fin de la récré' -
Autre faiblesse pointée du doigt par One: le maintien dans l'ombre des activités situées ailleurs que dans l'Union européenne puisque la publication par pays se limite à ce bloc.
"Sans ces informations, il sera impossible d'en savoir plus sur les activités des multinationales dans un grand nombre de paradis fiscaux et d'avoir des indications sur de possibles mécanismes d'évasion fiscale", regrettait récemment l'ONG.
Les mesures présentées mardi s'inscrivent dans une croisade beaucoup plus vaste qu'a lancé l'exécutif européen contre la fraude fiscale, après le scandale LuxLeaks en novembre 2014, qui avait profondément terni l'entrée en fonction de Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission européenne.
LuxLeaks avait mis en lumière un système d'évasion fiscale à grande échelle des multinationales et particulièrement le rôle joué par certains Etats, comme le Luxembourg, à une époque où M. Juncker était à la fois Premier ministre et ministre des Finances. Ce dernier avait donc dû promettre de mettre les bouchées doubles.
Le 28 janvier dernier, la Commission a ainsi présenté deux directives échafaudées dans la foulée d'un plan présenté en octobre 2015 par l'OCDE --organisation regroupant une trentaine de pays développés--, baptisé BEPS (Base Erosion and Profit Shifting, terme anglais désignant l'optimisation fiscale), qui promettait "la fin de la récréation" pour les multinationales soucieuses d'échapper au fisc.
L'une des directives prévoit l'échange automatique de renseignements sur les grandes entreprises entre administrations fiscales des différents pays européens, une autre de taxer les profits dans le pays dans lequel ils sont générés.
Mardi, la Commission doit également "proposer d'établir dans les six mois une liste noire européenne des paradis fiscaux".
"Prenons le Panama: il n'est officiellement considéré comme un paradis fiscal par seulement 8 pays de l'UE - 9 depuis que la France l'a rajouté. Ce n'est pas crédible. Nous avons un besoin urgent d'une vraie liste commune, avec des critères identiques et des menaces de sanctions fortes", a plaidé M. Moscovici dans son entretien lundi au Parisien.
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