Arseni Iatseniouk a fait cette annonce à l'occasion d'une émission de télévision hebdomadaire, assurant avoir fait tout son possible pour "assurer la stabilité du pays et construire une transition aussi calme que possible".
"J'ai décidé de quitter mes fonctions de Premier ministre de l'Ukraine", a-t-il poursuivi, alors qu'il avait échappé il y a moins de deux mois à une motion de censure du Parlement malgré l'appel du chef de l?État Petro Porochenko à sa démission.
"La crise politique en Ukraine est alimentée artificiellement. La volonté de remplacer un homme (Iatseniouk, ndlr) a aveuglé les hommes politiques du pays et paralysé leur volonté de changements réels dans le pays", a-t-il dit à l'adresse des politiciens ukrainiens.
Selon lui, sa démission doit être entérinée mardi par le Parlement et le président Petro Porochenko a déjà désigné le président du Parlement ukrainien, Volodymyr Groïssman, pour lui succéder.
"A partir d'aujourd'hui, je vois ma mission comme étant plus large que mes pouvoirs en tant que chef du gouvernement", a poursuivi Arseni Iatseniouk, 41 ans.
Tout en se prononçant pour "une nouvelle législation électorale, des réformes constitutionnelles, une réforme de la justice, une coalition contrôlant le nouveau gouvernement, le soutien international à l'Ukraine et son intégration dans l'Union européenne et dans l'Otan", il n'a rien dit du rôle qu'il entendait désormais jouer dans la politique ukrainienne.
- Ascension et chute éclair -
Nommé chef du gouvernement en février 2014, dans la foulée du succès du mouvement pro-européen du Maïdan, Arseni Iatseniouk avait d'abord été le chouchou des Occidentaux, parlant couramment anglais et rompant avec ses prédécesseurs aux passés et habitudes soviétiques.
Alors que l'Ukraine est confrontée à une crise économique gravissime, sa politique de rigueur budgétaire drastique lui permet d'obtenir une perfusion indispensable du Fonds monétaire international (FMI).
Ses prises de position antirusses et son plaidoyer en faveur de l'adhésion à l'Otan, idée dont la popularité a bondi depuis 2014 en Ukraine, touchent la fibre patriotique d'une bonne partie de la population, ce qui permet à son parti Front national d'arriver en tête du scrutin proportionnel lors des législatives de fin 2014.
Mais son étoile a pâli et Arseni Iatseniouk essuie depuis de nombreux mois un feu nourri de critiques, en raison de l'insuffisance des réformes promises et de scandales de corruption touchant son entourage.
Crédité de seulement 8% de taux d'approbation dans les sondages, la coalition qu'il forme avec le président Petro Porochenko est fragilisée et il semble même lâché en février 2016 par le chef de l?État, qui appelle à sa démission.
Après l'échec de la motion de censure, la coalition est même sur le point d'éclater après la sortie de deux partis la constituant, représentant à eux deux 45 députés au Parlement sur un total de 450.
Les deux partis restants, celui du président et celui de M. Iatseniouk, perdent dès lors la majorité, ne disposant que de 217 voix alors qu'un minimum de 226 est requis au parlement.
Arseni Iatseniouk semble aussi lâché par les Occidentaux et le FMI menace même en février de couper l'aide financière cruciale qu'elle a promise à Kiev face aux "lenteurs" de la lutte anti-corruption dans le pays.
La démission d'Arseni Iatseniouk ouvre la voie à un gouvernement totalement nouveau en Ukraine, qui devrait toutefois continuer sur une même politique pro-occidentale.
Selon les experts et les médias ukrainiens, l'un des plus importants changements pourrait concerner la ministre des Finances d'origine américaine Natalie Jaresko, appelée à partir.
Elle pourrait être remplacée par l'ancien ministre des Finances slovaque Ivan Miklos, qui s'est déclaré prêt à rejoindre le gouvernement s'il est autorisé à garder sa citoyenneté slovaque et se voit garantir les mains libres pour combattre la corruption.
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