Dans un exercice de communication calamiteux, le leader conservateur s'y est pris à cinq reprises pour finir par avouer qu'il avait bien détenu des parts dans la société offshore de feu son père Ian dont le siège est aux Bahamas, mentionnée dans les fichiers livrés à la presse et dénonçant l'évasion fiscale.
Conséquence : sa cote de popularité a chuté au plus bas depuis juillet 2013 avec 58% d'opinions défavorables, derrière le chef de l'opposition travailliste Jeremy Corbyn, selon un sondage YouGov dont les résultats ont été rendus publics vendredi.
L'opposition a vivement réagi, dès lors que M. Cameron se présente en chevalier blanc de la lutte contre la corruption et de la transparence, thème d'un sommet organisé par ses soins le mois prochain à Londres.
"La façon tortueuse dont les informations ont été arrachées au Premier ministre ruine sa crédibilité", a lancé Nicola Sturgeon, chef du parti nationaliste écossais SNP (centre gauche).
"Il y a une érosion significative de la confiance dans le Premier ministre parce qu'il n'a pas été honnête", a renchéri John Mc Donnell, ministre des Finances fantôme du parti travailliste, sans toutefois aller jusqu'à demander sa démission.
"Il va lui être difficile de donner des leçons aux autres au sommet contre la corruption", relève pour l'AFP Ian Bond, expert au Centre for European Reform.
Mais au-delà, il estime que si "ce n'est pas une bonne nouvelle pour lui, le référendum sur l'UE est encore loin et il a le temps de se remettre en selle".
Pour sa part, Ramon Pacheco Pardo, enseignant en politique économique internationale au King's College de Londres, considère que "même si David Cameron n'a pas agi de façon immorale, dès lors que son gouvernement demande aux compagnies de payer une juste part d'impôts et aux particuliers de payer tous leurs impôts, cela affaiblit son capital politique".
- "Son 6e sens l'a abandonné"
Les critiques fusaient y compris dans son camp. "Son sixième sens semble l'avoir abandonné dans sa gestion des allégations concernant son père", note Paul Goodman, ancien député conservateur, sur le site internet Conservative Home. "C'est sans doute parce que le référendum sur l'UE pompe toute son énergie, sa concentration et celle de Downing Street -tout comme sur Port Talbot la semaine dernière, dont l'avenir menacé les a pris par surprise", ironise-t-il.
Le gouvernement Cameron est aussi sous pression depuis l'annonce la semaine passée du retrait du Royaume-Uni du groupe sidérurgique indien Tata, qui va vendre son site de Port Talbot, menaçant à terme quelque 15.000 emplois. Manifestement pris de court, le gouvernement s'est vu accuser d'avoir privilégié sa relation avec la Chine en acceptant son dumping sur les prix de l'acier au détriment de sa propre industrie.
Comme si tout cela ne suffisait pas, s'est ajoutée cette semaine une autre mauvaise nouvelle : le non des Néerlandais, mercredi, à un accord d'association entre l'UE et l'Ukraine, un camouflet pour le bloc européen. Les partisans d'un British Exit (ou Brexit) jubilaient, tandis que David Cameron tentait de conjurer le mauvais sort en assurant que les deux questions n'avaient rien à voir.
"Cela n'aura pas d'impact direct sur le vote au référendum, juge Ian Bond, mais cela fait partie de la vague d'euroscepticisme qui balaie l'Europe."
M. Cameron joue sa carrière et sa place dans l'histoire avec le référendum du 23 juin qui doit décider du maintien ou non du Royaume-uni dans l'UE. Le dernier sondage en date donne le non légèrement en tête et les analystes insistent sur l'importance de la participation des jeunes, davantage favorables à l'Europe, pour assurer une victoire du oui.
Le Premier ministre déploie donc les grands moyens et s'est lancé dans une série de déplacements pour débattre avec le public. Mais là aussi, il s'est fait épingler, pour la distribution massive de tracts organisée cette semaine par le gouvernement. Certains l'accusent d'utiliser de manière inéquitable les fonds publics pour financer cette campagne, d'un coût de neuf millions de livres (11 millions d'euros).
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