"Après trois mois de discussions avec Orange, un accord n'a pu être trouvé. En conséquence, le conseil d'administration de Bouygues a décidé à l'unanimité de mettre fin aux négociations", a indiqué le groupe industriel dans son communiqué.
"A l'issue de discussions approfondies, le conseil d'administration d'Orange a constaté qu'un accord en vue d'un rapprochement avec Bouygues Telecom n'a pu être trouvé. Il a donc été décidé de mettre un terme aux discussions", a confirmé de son côté l'ex-monopole Orange.
Parmi les points d'achoppements qui ont compliqué les discussions, un porte-parole de Bercy a pointé "en particulier celui du risque d'exécution sur lequel les entreprises n'ont pas pu s'entendre", a expliqué un porte-parole de Bercy.
Le groupe Bouygues, mais aussi les opérateurs Iliad-Free de Xavier Niel et SFR de Patrick Drahi, prêts à racheter une partie des actifs de sa filiale télécom, s'inquiétaient des risques liés à un possible veto de l'Autorité de la concurrence.
Par ailleurs, les intentions d'Iliad-Free n'ont pas toujours semblé claires, de l'avis de l'une des sources proches des négociations.
"On a toujours senti que Xavier Niel ne jouait pas le jeu et n'a pas arrêté d'ajouter des conditions. Il pouvait risquer de faire planter l'accord à tout moment", avec pour objectif de racheter ensuite Bouygues Telecom a bas prix, estime-t-elle.
Les exigences de l'Etat actionnaire représentaient aussi des obstacles "inacceptables" pour le groupe de Martin Bouygues, qui devait obtenir une participation de 12% dans le nouvel ensemble à laquelle se serait ajoutée un paiement en liquidités.
L?Etat voulait "que les actions Orange soient valorisées à un prix très supérieur au marché, en imposant des conditions très strictes en matière d'actionnariat à Bouygues", expliquait un peu plus tôt à l'AFP une source proche du dossier.
Bouygues espérait vendre sa filiale télécoms pour environ 10 milliards d'euros, le montant qu'avait mis sur la table Patrick Drahi, lors d'une offre l'an dernier, qui avait été rejetée.
L'Etat, dont la participation au capital d'Orange, actuellement de 23%, devait être diluée une fois l'accord conclu, contestait cette valorisation et voulait la revoir à la baisse.
- "Un tel niveau de complexité" -
Autre point de blocage, la volonté de l'Etat que Bouygues ne puisse augmenter sa participation au capital d'Orange pendant plusieurs années et renonce à ses droits de vote double, sur une longue période, ce qui aurait de facto limité son influence au sein de l'opérateur historique.
Le ministre de l'Economie Emmanuel Macron, en charge des négociations "a fait son banquier d'affaires" alors que François Hollande et Manuel Valls "voulaient que ça se fasse pour relancer l'investissement dans la fibre", a nuancé une source proche.
Les opérateurs devaient aussi se répartir les près de 8.000 salariés de Bouygues Telecom alors que l'Etat tenait à ce que l'opération se fasse sans aucun licenciement.
"Cela avait atteint un tel niveau de complexité que ça a échoué. On a abouti à un monstre contractuel avec de trop grosses incertitudes sur le plan concurrentiel. Bouygues a trouvé au final que c'était trop risqué", a poursuivi cette source proche, en stigmatisant par ailleurs "un manque de leadership" de la part d'Orange.
Alors que les partenaires s'accusent mutuellement de l'échec des discussions, le résultat est que le rapprochement qui aurait permis de faire passer le nombre d'opérateurs en France de quatre à trois, et qu'ils appelaient tous de leurs voeux, ne se fera pas.
Les discussions entamées au tout début janvier et qui devaient initialement s'achever le 31 mars, étaient si complexes que les deux groupes s'étaient donnés jusqu'au week-end à venir pour régler les dernières difficultés.
Alors que les trois autres opérateurs ont redressé leurs comptes, Bouygues Telecom, qui a creusé sa perte à 59 millions d'euros l'an dernier, sera à la peine pour continuer son chemin de façon autonome, et aura fort à faire pour remotiver ses troupes après une longue période d'incertitudes pour ses salariés.
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