Il y a eu 1974, une partie de Campagne (sorti en 2002), de Raymon Depardon, sur Valéry Giscard d'Estaing et Le Président (2010) d'Yves Jeuland, sur Georges Frêche. Et depuis, plus rien. Autant dire que le documentaire partant sur les traces d'un homme aspirant au pouvoir reste rare. L'initiative de Laurent Cibien, ex grand reporter devenu réalisateur, n'en est que plus précieuse. Ce quadra vient de sortir Édouard, mon pote de droite, où il filme le (déjà) maire du Havre Édouard Philippe les trois mois précédant les élections municipales de 2014 dans la plus grande ville de Normandie.
De Rocard à l'UMP
Mais la relation entre les deux hommes remonte à bien plus loin, au début des années 1990 : "Nous avions 18 ans et nous étions dans la même classe, en hypokhâgne. Nous étions assez potes cette année là, même si j'étais plutôt d'extrême gauche tendance écolo et lui plutôt Pierre-Mendès France et Michel Rocard, raconte Laurent Cibien. Puis nous nous sommes perdus de vue une douzaine d'années." Les retrouvailles se font dix ans plus tard : "Fin 2002, je lis une brève dans le Canard Enchaîné où je vois qu'un certain Édouard Philippe avait été nommé directeur général de l'UMP. J'ai appelé le parti et j'ai demandé à lui parler. On est allé boire un verre."
« Il ne m'a imposé aucune limite »
Cette rencontre est la première d'une longue série. "Je ne connaissais pas le monde politique, je lui posais des questions sur la mécanique des partis. Puis de fil en aiguille, je lui ai demandé de me montrer, puis de me laisser le filmer." Et l'homme politique dit banco : "Il est joueur, ça l'intéressait. Il croyait sincèrement à ce qu'il faisait et voulait expliquer comment cela marchait." S'ensuivent dix années, où, caméra au poing, Laurent Cibien suit à la trace son ex-camarade de prépa. Sans filet : "Il ne m'a imposé aucune limite. La seule règle, c'est si quelqu'un ne voulait pas être filmé, je ne le filmais pas, point. Il ne m'a jamais influencé."
Le résultat, concentré sur les trois mois précédant les municipales, donne un long-métrage sans filtre ni intermédiaire. Seuls l'image et Édouard Philippe parlent : "C'est un choix de réalisation. Il n'y a pas de voix off, je ne dis pas ce qu'il faut penser. Je veux offrir aux spectateurs suffisamment d'options qu'il se fassent eux-mêmes un avis."
Filmer la mécanique du pouvoir
Mais quelle fut l'attitude d'Édouard Philippe face caméra ? "Je n'ai pas eu l'impression qu'il surjouait. Quand je ne filmais pas, il était pareil. Il oubliait la caméra." Depuis, le long-métrage a été visionné par l'élu devenu en dix ans maire du Havre, député et lieutenant d'Alain Juppé, candidat à la primaire des Républicains. Une ascension qu'a voulu décrire Laurent Cibien : "C'est un film sur l'ascension et la mécanique du pouvoir. D'habitude, il y a des longs-métrages sur l'homme quand il exerce le pouvoir, j'ai préféré la démarche inverse."L'initiative devrait durer dans le temps : "L'idée serait vraiment de filmer sur une longue période et de voir comment se construit une carrière politique." Édouard, mon pote de droite, n'est donc qu'un premier épisode. Et cela tombe bien, la carrière d'Édouard Philippe, semble bien loin d'être terminée.
Pratique. Sortie le mercredi 23 mars, au Sirius au Havre.
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