Le 17 décembre prochain, Charles Corlet fêtera ses 80 ans, "en même temps que le Pape François", s'amuse-t-il, lui qui a un temps envisagé d'être prêtre en Afrique. C'est le moment qu'il a choisi pour prendre un peu de retrait du groupe d'imprimerie familial de Condé-sur-Noireau, en Suisse Normande, 66 ans après que son père lui a confié un poste de typographe dans l'entreprise qu'il avait créée. Son parcours, il ne le compte pas en années, mais en rencontres. Celles avec "des gars qui m'ont aidé, qui m'ont appris le respect des autres", puis avec ceux que lui a soutenus.
Du Pape François qu'il cite, il partage sans doute la bonhommie du grand-père parfait tout comme la foi en l'Homme. Lorsqu'il reprend les rênes de la société, l'imprimeur, devenu éditeur quelques années plus tard, applique sur le terrain les valeurs de solidarité et d'entraide qu'il a acquises. Notamment lorsqu'il était petit, sinistré pendant la guerre, "une école où l'on a appris la vie, la privation, le dynamisme ou la prise de décision."
"Aider, c'est ma drogue"
En Tunisie, sa femme et lui ont fait construire une imprimerie pour "aider la jeunesse". Même chose en Roumanie. Son bref passage dans la presse, il le consacre "à défendre la veuve et l'orphelin". "J'ai envie de donner une chance aux personnes qui n'en ont pas eu. C'est un besoin, c'est ma drogue", lance-t-il avec un sourire. "Et aujourd'hui encore, je veux parler, parler, parler : donner envie aux jeunes. Il faut y aller !"
[PORTRAIT] Charles Corlet décoré ce lundi par le ministre Emmanuel Macron à Condé-en-Normandie
Il poursuit ensuite la marotte de son père, en œuvrant à la réinsertion des détenus. L'intégration dans son entreprise du plus emblématique d'entre eux, condamné pour le meurtre d'un enfant, lui vaudra de nombreuses menaces. Là, le ton de Charles Corlet se fait plus grave : "J'ai 17 classeurs de lettres reçues après l'embauche de Patrick Henry. L'imprimerie a dû être gardé par des gendarmes pendant des semaines..." Quand l'homme est interpellé de nouveau en possession de drogue, l'imprimeur y voit un vrai "coup de Jarnac".
Sa vérité sur l'affaire Patrick Henry
Quinze ans après cet épisode, c'est dans un livre que Charles Corlet donnera sa vérité à la fin de l'année, pour tenter de refermer le dossier, alors même que Patrick Henry doit être fixé sur une prochaine libération conditionnelle.
[PORTRAIT] Charles Corlet décoré ce lundi par le ministre Emmanuel Macron à Condé-en-Normandie
Mais si l'affaire l'a refroidi, il garde une confiance indéfectible dans l'Homme. Il doit céder ce 31 mars l'entreprise de toute sa vie "à des plus jeunes", un duo composé de Gilles Nadin et John Linquist, pour un euro symbolique. "J'ai appris grâce à ces expériences humaines ce qu'on apprend nulle part ailleurs. Au moment de partir, j'espère juste être très très riche... là-dedans", conclut-il en pointant son crâne. "C'est là qu'on est le plus heureux."
Le groupe Corlet en chiffres :
- 9 sites de production dont les deux principaux à Condé-sur-Noireau, Corlet imprimeur et Corlet numérique.
- 405 collaborateurs
- chiffre d'affaires : 51 millions d'euros
- 35 000 tonnes de papier par an, pour imprimer 400 titres différents chaque jour
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