"De nombreuses innovations thérapeutiques apparaissent dans le domaine du cancer. (...) Pourtant, le coût d'abord croissant et maintenant exorbitant de ces innovations risque fort de compromettre ces espoirs", écrivent Dominique Maraninchi, ancien président de l'Institut national du cancer (Inca) et Jean-Paul Vernant, auteur des recommandations du 3e Plan cancer, dans une pétition signée par 110 médecins publiée mardi par Le Figaro.
En 2014, le Gleevec, traitement contre la leucémie myéloïde chronique, coûtait au moins 80.000 dollars par an et par personne aux Etats-Unis. En France, il oscillait entre 27.000 et 40.000 euros selon la dose prescrite, indique par exemple l'association La Ligue contre le cancer.
Le coût du Keytruda, l'une des toutes dernières molécules contre le traitement du mélanome, est même estimé à plus de 100.000 euros pour chaque patient traité en France.
Dès décembre, le Professeur Vernant dénonçait l'inflation des prix.
"En 2004, les médicaments contre le cancer représentaient 24 milliards de dollars; en 2008, 40 milliards; en 2014, 80 milliards sur un total de 650 milliards du coût des médicaments", précisait-il, soulignant que si l'inflation n'est pas contenue, en 2020, ils représenteront 155 milliards de dollars, soit un doublement en six ans.
L'augmentation des coûts de ces traitements est liée à la multiplication des thérapeutiques "ciblées".
Autrefois, un seul et même médicament traitait des dizaines de milliers de patients. Aujourd'hui, les avancées scientifiques, qui identifient toujours plus précisément les types de cancers ou de tumeurs, conduisent à la mise au point de molécules s'adressant à des "sous-groupes de malades" qui se comptent parfois en seulement quelques dizaines.
- 'Au-delà de l'acceptable' -
Ces nouvelles molécules pourraient à terme menacer l'équilibre financier du système de santé, a récemment estimé Agnès Buzyn, nouvelle présidente de la Haute autorité de santé (HAS), qui évalue environ 800 médicaments chaque année en vue de leur remboursement par la sécurité sociale.
De son côté, en juillet 2015, le directeur général de l'Assurance maladie, Nicolas Revel, notait que le principal défi pour les trois prochaines années était "de permettre à notre pays de pleinement bénéficier des avancées thérapeutiques (...) sans rationner l'accès à ces nouvelles thérapies, sans augmenter les restes à charges sur les assurés mais sans renoncer non plus à réduire nos déficits sociaux".
L'objectif est d'autant plus difficile à tenir que "les demandes de prix des fabricants vont parfois au-delà de l'acceptable", observait-il alors.
En 2015, le coût global de la prise en charge des traitements anticancéreux a représenté environ 10% des dépenses de l'Assurance maladie contre 6,6% en 2007, selon La Ligue.
Le prix de ces médicaments n'est nullement justifié par les investissements des laboratoires pharmaceutiques en matière de Recherches et développement (R&D), estiment pourtant les cancérologues.
Au contraire, "de façon paradoxale, les prix des nouveaux produits explosent alors que le coût de leur R&D a diminué", écrivent-ils.
La R&D représente environ 15% du chiffre d'affaires des industriels contre plus de 25% pour les dépenses de marketing, ajoutent-ils.
"Alors que les anciens traitements du cancer étaient souvent issus de longs et difficiles screenings (dépistages)", les nouvelles molécules "visent des cibles définies a priori, et le plus souvent fournies par la recherche publique", notent-ils également.
Face à ces menaces, les signataires proposent "de définir un juste prix pour les médicaments du cancer, basé sur les sommes investies par les industriels pour la R&D du produit", auquel "s'ajouterait un retour sur investissement raisonnable".
Dans l'entourage de la ministre de la Santé, on note que le maintien de soins de qualité et l'accès à l'innovation "suppose effectivement que les prix des traitements innovants soient maitrisés".
"Marsiol Touraine a déjà officiellement mobilisé ses homologues au niveau international" dans le cadre notamment du G7 Santé à Berlin, souligne-t-on. "Cette initiative doit se poursuivre".
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