Devant les ministres de l'Agriculture des 28 réunis à Bruxelles, le commissaire européen Phil Hogan s'est dit à la mi-journée "prêt à proposer" l'activation d'une mesure spécifique du marché commun, l'article 222, sur la dérogation au droit de la concurrence.
Comme le réclamait notamment la France, il s'agit de permettre aux associations professionnelles et interprofessionnelles du secteur laitier de se mettre d'accord "de manière volontaire et temporaire" sur des seuils de production, selon une source proche du dossier.
"Les modalités complètes de cette mesure doivent encore être finalisées par la Commission et j'espère que nous serons en mesure de les communiquer aux Etats membres très prochainement", a ajouté le commissaire à l'Agriculture, cité dans un communiqué.
Le plan d'urgence débloqué il y a six mois n'a pas suffi à soulager les agriculteurs européens, confrontés à un effondrement des prix du lait et du porc, dans un contexte marqué par la faiblesse de la demande et un embargo russe malvenu.
Invités à proposer de nouvelles pistes par la Commission, les Etats membres ne se sont pas fait prier: "Il y a eu cent propositions de nouvelles mesures", a souligné lundi le ministre néerlandais de l'Agriculture Martijn van Dam, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE.
Ces propositions ont été débattues lundi entre les ministres de l'Agriculture des 28, alors qu'une centaine d'agriculteurs belges manifestaient en plein quartier européen, certains venus avec leurs animaux: vaches, agneaux ou porcelets.
"Aujourd'hui nous produisons à perte et nous attendons de l'Europe qu'elle remette en place des mécanismes qui existaient par le passé pour nous empêcher de vendre à perte et de faire faillite", a expliqué à l'AFP François Lejeune, vice-président de l'Association des jeunes agriculteurs de Wallonie.
"J'espère aujourd'hui que les choses vont bouger dans le sens qui consiste à faire le constat tout simple que l'on est en surproduction dans beaucoup de secteurs agricoles", a de son côté plaidé le ministre français de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, en arrivant à la réunion.
- Un Observatoire du marché de la viande -
La France, première puissance agricole européenne, a multiplié les contacts avec d'autres gouvernements et estime notamment avoir rallié une majorité autour de mesures pour "stabiliser puis réduire" la production de lait, dont les niveaux, exceptionnels en Europe depuis la fin des quotas en avril 2015, contribuent à l'effondrement des prix.
Pour lutter contre l'appauvrissement des exploitations qui en résulte, Phil Hogan a proposé aussi un doublement des niveaux de stockage pour le lait écrémé en poudre et le beurre, respectivement à 218.000 tonnes et 100.000 tonnes, de manière à limiter temporairement la production.
La France souhaitait pour la poudre de lait un relèvement du plafond à 160.000 tonnes pour l'ensemble des 28 (contre 109.000 actuellement).
Quant au niveau plafond des aides ministérielles par exploitant et par an, le commissaire Phil Hogan a souhaité son maintien à 15.000 euros, alors que de nombreux Etats membres voudraient le voir passer dans la fourchette 20.000-30.000 euros.
La révision du montant du plafond nécessiterait "au moins sept mois" étant donné le nombre d'étapes pour adopter une telle mesure, a-t-il argué.
Pour répondre à la crise porcine, M. Hogan s'est dit prêt à envisager un nouveau schéma de soutien au stockage privé des carcasses, ainsi qu'à la mise sur pied d'un Observatoire du marché de la viande (bovine et porcine).
Parmi les autres propositions soumises par les Etats membres, plusieurs pays réclament aussi des crédits à l'exportation, auxquels l'exécutif européen ne ferme pas la porte.
"Si on n'est pas capable ensemble à l'échelle européenne de mieux se coordonner et mieux se concerter, à ce moment là on ira vers des situations encore plus graves que celles que l'on connaît", a mis en garde M. Le Foll.
Mais la Commission a déjà prévenu avant la réunion de lundi qu'elle n'avait pas l'intention d'accepter de nouvelles dépenses financées par de "l'argent frais", et qu'elle avait des réticences à utiliser "la réserve de crise" européenne, "parce qu'il s'agit de l'argent des agriculteurs".
Le plan d'urgence européen lancé il y a six mois prévoyait notamment 500 millions d'euros, principalement sous forme d'enveloppes nationales d'aides directes aux agriculteurs des secteurs les plus touchés, que les Etats membres peuvent doubler avec des fonds nationaux.
La Commission fait valoir que les aides débloquées n'ont pas toutes été utilisées par les Etats membres.
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