La nouvelle mouture est annoncée comme un "compromis ambitieux". Mais l'exécutif est pris en tenailles entre des attentes difficilement conciliables.
D'un côté, des syndicats (CGT, FO notamment), des jeunes, des socialistes réclament le retrait pur et simple du projet qu'ils assimilent à un détricotage du code du travail.
A l'opposé, le patronat refuse son "affadissement". "Renoncer serait suicidaire", a prévenu dimanche le négociateur social du Medef, Alexandre Saubot, pointant l'explosion du chômage en France.
Entre les deux, des syndicats dits réformistes, CFDT en tête, qui ont milité pour une réécriture des points litigieux. En particulier : le plafonnement des indemnités prud'homales, les critères de licenciement économique ou des décisions unilatérales des patrons de PME en matière d'aménagement du temps de travail.
Même dans ce camp qui a joué la carte de la négociation (CFDT, CFTC, CFE-CGC, Unsa), le ton s'est durci à la veille des arbitrages. Les "réformistes" brandissent aujourd'hui la menace d'une mobilisation "dans la rue".
Faute de retrait des "mesures néfastes", "on ira au clash", a lancé dimanche soir le numéro un de la CFDT Laurent Berger sur iTELE.
Le président de la République et le Premier ministre se sont encore parlé tout au long du week-end, pour des arbitrages qu'ils prendront "en commun" et que Matignon présentera, indiquait-on dans l'entourage de François Hollande.
A 14h30 lundi, le Premier ministre, entouré de Myriam El Khomri (Travail) et Emmanuel Macron (Economie), livrera donc aux partenaires sociaux le fruit des intenses tractations des derniers jours.
Aux côtés des interlocuteurs habituels, CGT, FO, CFDT, CFE-CGC, CFTC et Unsa, pour les syndicats de salariés, Medef, CGPME et Upa, pour le patronat, ont également été invitées les deux premières organisations étudiantes, l'Unef et la Fage.
Redoutant de s'aliéner les jeunes, l'exécutif les avaient déjà reçus vendredi, deux jours après leur mobilisation estampillée #OnVautMieuxQueCa. Mais le "désaccord de fond" a perduré, selon le président de l'Unef William Martinet.
Mercredi, plusieurs milliers d'étudiants et lycéens avaient battu le pavé contre cette loi de la "précarité", comme les salariés en grève à l'appel de la CGT, de FO, de la FSU et de Solidaires.
Et l'Unef planifie déjà une nouvelle journée d'action le 17 mars avant de se rallier le 31 à l'appel à la grève et à manifester des syndicats, notamment la CGT et FO.
- Fracture à gauche -
La majorité est elle-même divisée. Des parlementaires menacent de s'y opposer et le Mouvement des jeunes socialistes (MJS) est très remonté. Mercredi, une quinzaine de parlementaires socialistes sont ainsi descendus dans la rue, avec des membres d'EELV.
"Si ce projet passe, je pense qu?on aura malheureusement fracturé la gauche, et (...) déçu beaucoup de nos électeurs", a averti Benjamin Lucas, le président du MJS.
Un élu PS confiait que le séminaire de députés socialistes organisé mardi par le Premier ministre avait fait apparaître "beaucoup d'inquiétudes", et pas seulement parmi les frondeurs, mais chez des gens "qui se sentent heurtés dans leurs convictions". Un nouveau séminaire se tiendra lundi soir.
Face à ces dissensions, la droite redoute que le texte, dont le premier jet avait été salué dans ses rangs, ne soit vidé de sa substance.
"Je crains que ce ne soit feue la loi Travail et que (...) le président de la République et le Premier ministre en écrivent le faire-part" de décès, a ainsi déclaré dimanche le président LR du Sénat Gérard Larcher.
"Dans le meilleur des cas, la montagne accouchera d'une souris", a prédit mercredi Nicolas Sarkozy.
"Ca fait penser à la réplique du film Le Guépard: +il faut que tout change pour que rien ne change+", a renchéri dimanche Jean-François Copé, député LR candidat à la primaire, sur France 3. "Ca fait 20 ans, 30 ans, qu?on a les mêmes scénarios".
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