Thubelihle a obtenu une bourse d'études qui couvre ses frais de logement et de scolarité jusqu'à sa licence en sciences de l'éducation, à l'université de Pretoria.
Cette aide réservée aux jeunes filles vierges, est une initiative du district d'Uthukela, en pays zoulou, à environ 200 km au nord de la ville de Durban (est). Elle est destinée à réduire les grossesses précoces et la propagation du sida.
Son montant varie selon les cas, mais peut atteindre plusieurs milliers d'euros par an.
"Cette bourse d'études est capitale parce qu'elle va changer mon avenir. Je vais pouvoir conquérir le monde", s'enthousiasme Thubelihle, vêtue d'une mini-jupe jaune et verte et d'un tee-shirt relevé d'un collier de perles multicolores.
La bénéficiaire la plus âgée du programme, Bongiwe Sithole, a pu reprendre le chemin de la faculté grâce à cette bourse réservée aux vierges. A 32 ans, elle n'a jamais eu de relations sexuelles. "On obtient cette bourse, qu'on réussisse avec mention ou pas", souligne-t-elle.
Chaque année, les 16 jeunes femmes de ce programme qui vient d'être lancé, baptisé "Bourse d'études pour les vierges", seront soumises à des tests, conduits par des femmes plus âgées qui examineront visuellement le vagin des étudiantes. Une technique qui n'est pas scientifiquement prouvée.
S'il s'est avéré qu'elles ont eu des relations sexuelles, la bourse leur sera supprimée.
Cette initiative créé une vive controverse, notamment parmi les militants des droits de l'Homme. Mais les autorités d'Uthukela le défendent bec et ongles.
"La principale raison pour laquelle la bourse d'études a été créée est que (...) dans notre district, nous avons un taux élevé de grossesses précoces chez les adolescentes, et de nombreux jeunes ont le sida", explique à l'AFP la maire Dudu Mazibuko.
Dans le district d'Uthukela qui compte 800.000 habitants, près de la moitié des 15-49 ans sont infectés par le sida, selon les statistiques de la municipalité.
Le nombre de grossesses précoces est aussi très élevé en Afrique du Sud, avec environ 25% des jeunes filles enceintes à l'âge de 19 ans, selon Africa Check, un site internet africain de vérification des faits.
Pour Dudu Mazibuko, l'idée de cette bourse d'études singulière vient des "vierges" elles-mêmes, qui se plaignaient de ne pas être reconnues alors que les jeunes femmes enceintes se voyaient "récompensées" par le gouvernement avec des allocations familiales.
- Des bourses discriminatoires ? -
Mais pour les défenseurs des droits des femmes, ce programme est discriminatoire et intrusif.
La présidente de la Ligue des femmes du Congrès national africain (ANC, au pouvoir) et ministre du Développement social, Bathabile Dlamini, qualifie les tests de virginité de "pratique manifestement dangereuse imprégnée de pratiques patriarcales destinées à opprimer les femmes".
Pour le commissaire chargé de l'Egalité entre les sexes, Mfanozelwe Shozi, le programme "semble très discriminatoire" et viole la Constitution dans la mesure où il fixe comme "condition" d'attribution la virginité des jeunes filles.
Des groupes de défense des droits de l'Homme s'inquiètent également que les tests conduits soient intrusifs. Des arguments que les intéressés réfutent.
"Les tests de virginité ne constituent pas une atteinte à l'intimité. J'aime qui je suis et cela me donne plus de dignité", affirme Thubelihle, qui se voit en "modèle" pour les autres jeunes filles.
"Cela se fait sur une base volontaire. Ce n'est pas douloureux, il n'y a aucune humiliation", poursuit la maire Mazibuko.
C'est une ancienne employée du ministère de la Santé, Dudu Zwane, âgée de 58 ans, qui conduit les tests. "Je réintroduis notre culture. Notre bayethe (roi zoulou traditionnel) dit de garder sa virginité", affirme-t-elle, en rappelant le taux de prévalence du sida.
La maire nie que les tests soient "sexistes" et précise qu'un programme comparable est à l'étude pour les garçons - sans expliquer comment leur virginité serait testée.
Elle met au défi ses détracteurs de "trouver de meilleures solutions" pour "combattre le sida" et "mettre fin aux grossesses précoces".
"On a pensé que ce système marcherait pour nous", affirme-t-elle.
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