Les débats ont commencé dans la matinée par l'examen de la personnalité du prévenu, aux épaules tombantes. Bien loin de l'homme à la carrure de rugbyman décrit à l'époque par ses patients.
Visage bouffi, cheveux grisonnants, Jacobus - dit Mark - Van Nierop, 51 ans, a tenté d'esquiver les premières questions du président du tribunal Thierry Cellier. Agacé par ses "élucubrations", ce dernier l'a rappelé à l'ordre, estimant que ses réponses étaient "toujours très ambigües".
Selon l'une des expertises psychologiques, dont un extrait a été lu à l'audience, le quinquagénaire souffre d'une "pathologie narcissique majeure", entraînant l'effacement de "tout sens moral".
Un autre expert a toutefois souligné qu'il avait "parfaitement conscience de ses agissements".
"Je n'étais pas en état de me mettre à la place" des patients, a affirmé le prévenu, s'exprimant tantôt en français, tantôt en néerlandais.
Recruté par un chasseur de tête, Jacobus Van Nierop s'installe en 2008 à Château-Chinon, en plein Morvan, véritable désert médical.
L'homme mène grand train, entreprenant des travaux d'importance dans sa maison et séjournant régulièrement dans des hôtels de luxe.
Des irrégularités de facturation alertent la Sécurité sociale, ainsi que certains patients, tandis que les plaintes commencent à s'accumuler.
Parmi les plaignants, Nicole Martin, qui raconte avoir eu des "dents saines dévitalisées et des dents arrachées à cause d'abcès", constitue le "collectif dentaire". Au total, 120 victimes seront recensées.
- "Aimez-vous l'argent?" -
Sylviane Boulesteix, 65 ans, retraitée, consulte le Néerlandais en mars 2012 pour la pose d'un appareil dentaire. "Il m'a fait sept ou huit piqûres, arraché huit dents d'un coup et posé l'appareil à vif. Je pissais le sang. Pendant trois jours!", raconte-t-elle.
Parmi les parties civiles, Géraldine Letot, 36 ans, espère pour sa part que ce procès lui permettra "une reconstruction". Elle avait consulté M. Van Nierop pour une carie: "Quelques séances plus tard, j'avais treize dents douloureuses", raconte-t-elle.
Une ancienne collaboratrice a affirmé lors d'une audition, lue par le président, que l'objectif du dentiste était de "faire de l'argent".
"Aimez-vous l'argent ?", a alors demandé le président du tribunal. "Pas de commentaire", s'est borné à répondre le Néerlandais.
Le quinquagénaire a toutefois reconnu avoir réalisé sur certains patients des soins qui ne répondaient pas aux "règles de l'art".
Fin 2013, alors mis en examen sous contrôle judiciaire, l'homme avait fui au Canada "pour (se) suicider". Il sera interpellé en septembre 2014, tandis qu'il tentait de mettre fin à ses jours. Il garde de cette tentative de suicide une longue balafre dans le cou.
Extradé vers les Pays-Bas, M. Van Nierop "a dit avoir tué sa première femme, il a joué la folie, il a dit être transsexuel... Il a joué le tout pour le tout" pour éviter son retour en France, souligne Mme Martin.
Pour Me Joseph-Oudin, avocat du collectif, ce procès, où "l'on sent l'émotion chez les victimes", doit permettre de "comprendre comment on en est arrivé à un tel fiasco".
Aux Pays-Bas, il avait déjà fait l'objet de sanctions disciplinaires après des plaintes.
M. Van Nierop encourt dix ans de prison et 150.000 euros d'amende. Son procès, très médiatisé, doit durer jusqu'au 18 mars.
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