Le chef de la droite, le président du gouvernement sortant Mariano Rajoy (Parti populaire), puis Pablo Iglesias, dirigeant de Podemos, se sont succédé à la tribune pour annoncer leur vote négatif.
Pedro Sanchez est chargé par le roi Felipe VI de tenter d'obtenir l'investiture d'un Parlement fragmenté principalement entre quatre forces (PP, socialistes, Podemos, Ciudadanos) et des indépendantistes, un défi presque impossible sans alliances.
Les voix du PP et de Podemos représentent ensemble une majorité absolue de "non" (188 sur 350) contre les 130 voix (socialistes et centristes) disposées à soutenir Pedro Sanchez, un professeur d'économie de 44 ans dont le parti est arrivé deuxième aux élections, et candidat après que Mariano Rajoy a renoncé.
Ils ont dit à Pedro Sanchez qu'il devait choisir son camp, attaquant son programme de gouvernement, ne satisfaisant ni droite ni gauche.
"Nous voterons contre la candidature de M. Sanchez", a dit M. Rajoy en qualifiant sa démarche de "fraude", et affirmant qu'il voulait défaire les politiques de rigueur ayant permis la reprise en Espagne (+3,2% de croissance du PIB en 2015).
"Nous allons voter non à votre investiture, M. Sanchez", a dit aussi Pablo Iglesias, un professeur de sciences politiques de 37 ans, qui a pris pour la première fois la parole à la tribune de l'assemblée espagnole.
"Vous voulez consolider les principales politiques du PP", a-t-il ajouté, avant de l'accuser d'avoir dénaturé le Parti socialiste de son grand-père, celui d'hommes ayant risqué le peloton d'exécution sous la dictature et non de ceux rejoignant les conseils d'administration de grands groupes.
Pedro Sanchez avait tenté la veille de convaincre la gauche du Parlement de voter pour le "changement" après quatre ans de politiques d'austérité de la droite et alors que le chômage reste à 20,9%.
Il a détaillé les mesures les plus sociales de son programme, notamment les aides d'urgences aux plus démunis, plutôt que les concessions faites aux libéraux notamment en matière de droit du travail, en partie démantelé en 2012 par le gouvernement de M. Rajoy.
Mais pour être investi il a besoin de la majorité absolue des voix (176), qu'il n'obtiendra pas. Il pourra cependant encore tenter un second tour, vendredi, à la majorité simple.
- Des vers en galicien -
D'ici là, l'Espagne vivra les premiers débats d'un Parlement différent, où 211 députés sur 350 sont nouveaux. Beaucoup sont jeunes et incarnent le rejet de la classe politique traditionnelle, à travers l'émergence de Podemos et ses alliés et de Ciudadanos (centre libéral).
Mercredi, les élus d'un PP ayant perdu son écrasante majorité de 2011 ont ainsi dû écouter Pablo Iglesias rendre hommage aux victimes républicaines de la guerre civile (1936-1939). Et l'entendre dire que leur parti avait été fondé par sept ministres du dictateur Francisco Franco.
Les socialistes - qui ont obtenu aux élections du 20 décembre le pire résultat de leur histoire - se sont vu reprocher "l'hypocrisie de leur conformisme politique".
Ils ont aussi dû écouter une jeune députée d'un parti régional de Galice (nord-ouest) allié de Podemos, Alexandra Fernandez, 27 ans, déclamer des vers en galicien.
Les Espagnols ont enfin assisté au déchirement de la gauche. Pedro Sanchez a reproché à Podemos, favorable à la tenue du référendum d'autodétermination réclamé par les indépendantistes en Catalogne (nord-est), de vouloir "casser l'Espagne", tandis que Pablo Iglesias dénonçait son attitude "misérable".
D'ici deux mois, si aucune investiture n'est obtenue par Pedro Sanchez ou un autre candidat, de nouvelles législatives seront organisées, le 26 juin.
"Les Espagnols veulent un changement", a dit le leader centriste de Ciudadanos, Albert Rivera, 36 ans. "Arrêtez de vous battre pour des sigles" de partis, a-t-il lancé.
Pendant ce temps, a souligné l'indépendantiste de gauche catalan Joan Tarda, on oublie la crise institutionnelle de l'histoire récente de l'Espagne: "En Catalogne, nous en sommes déjà au scénario de la déconnexion, nous allons bientôt déclarer une république indépendante".
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