Elle n'ose pas s'éloigner de la clôture qui sépare les deux pays à cet endroit et de la petite porte découpée dans le grillage qui n'a pas ouvert depuis lundi. Quelque 350 personnes étaient alors passées en Macédoine.
Mais mardi, ce sont des centaines d'autres candidats à l'asile qui sont arrivés, la plupart après des kilomètres de marche, dans le camp d'Idomeni qui déborde dans tous les champs alentours, a constaté l'AFP.
"Le nombre augmente d'heure en heure, il est difficile à évaluer", a indiqué une source policière, tandis que le HCR estimait à 8.500 personnes, dont beaucoup de femmes et d'enfants, l'affluence à Idomeni.
Arrivée il y a dix jours, la famille de Zahraa a hérité d'un numéro, le "196", qui doit logiquement lui permettre de passer bientôt la frontière. A condition d'être au bon endroit, au bon moment.
"En nous réveillant (lundi, ndlr) nous avons appris que la frontière avait ouvert à l'aube. Nous dormions et nous n'avons rien su", se désole l'adolescente qui voyage avec sa mère, sa soeur, le mari de cette dernière et leurs deux jeunes enfants.
"Les Macédoniens nous préviennent à la dernière minute, nous n'avons aucune visibilité", s'agace un policier grec assailli d'une seule et même question: "savez-vous quand il vont ouvrir ? Vont-ils ouvrir ?"
- Trois jours sans bouger -
Autour du camp principal d'Idomeni et de ses grandes tentes blanches collectives, prévues pour moins de 2.000 personnes, les dômes de toile fournis par les ONG ont poussé par dizaines depuis que les pays des Balkans, jusqu'à l'Autriche, filtrent drastiquement les entrées sur leur territoire.
La Grèce a soumis mardi un plan "d'urgence" à l'Union européenne pour l'aider à organiser l'accueil de 100.000 réfugiés sur son territoire. La Commission européenne, qui avait proposé de dégager une enveloppe exceptionnelle, devrait l'approuver mercredi.
Le prochain groupe pressenti pour passer la frontière à Idomeni, d'environ 200 personnes, se presse près de la clôture. Certains attendent sans bouger depuis trois jours, s'entassant la nuit pour dormir sous une bâche.
Parmi elles, Fayssal, un Syrien de 30 ans amputé des deux jambes après un bombardement à Damas, qui voyage équipé de deux prothèses "de quatre kilos chacune", avec l'aide de son copain Hassan, explique-t-il.
Tous sont Syriens ou Irakiens, alors que les Afghans et les demandeurs d'asile d'autres nationalités, ne sont plus admis en Macédoine
Aux Syriens et Irakiens qui veulent continuer vers l'Autriche ou l'Allemagne, les autorités demandent désormais des documents d'identité complets, que tous ne peuvent pas fournir.
Zaraah et les siens ont miraculeusement sauvé leurs papiers des décombres de leur maison de Bagdad, soufflée en décembre par l'explosion d'une bombe dans un supermarché voisin, explique l'adolescente.
Tous les six veulent désormais rejoindre la Suède, où étudie l'un des frères de Zaraah.
Mais un doute habite désormais la jeune fille : un agent du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) de l'ONU dans le camp d'Idomeni lui a parlé d'un programme de prise en charge, d'un avion, d'un accueil organisé dans un pays européen...
Ce plan de répartition des réfugiés est l'un des outils de l'UE pour tenter de gérer collectivement la crise migratoire. Sur 160.000 bénéficiaires visés, moins de 600 ont effectivement été relocalisés depuis l'automne dernier.
Choisir le pays d'accueil n'est pas envisageable. "Ca veut dire sans doute ne pas aller en Suède", réfléchit Zaraah à haute voix.
"Il faut se mettre à leur place", souligne sous couvert d'anonymat une employée du HCR à Idomeni. "Vous êtes sur la route depuis des semaines avec un but, souvent des proches dans un pays européen. On vous demande de changer vos plans..."
Une Grèce "déjà exténuée (...) ne peut pas gérer cette situation toute seule", a averti le HCR mardi dans un communiqué, mettant en garde une nouvelle fois contre une "crise humanitaire imminente".
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