L'audience présidée par la vice-présidente du tribunal Valérie Quemener devait s'ouvrir mardi à 14H00 et examiner le recours, suspensif, déposé selon leur avocate par 250 migrants et dix associations. Ils réclament la suspension de l'arrêté préfectoral pris vendredi ordonnant aux occupants de la zone sud du bidonville de quitter les lieux d'ici mardi soir 20H00.
La décision, "ce ne sera pas aujourd'hui", a-t-on appris auprès du tribunal, qui n'avait jamais dit que la juge statuerait immédiatement après la fin de l'audience. Le juge doit rendre une ordonnance motivée, ce qui suppose du temps pour la rédiger. Elle devrait être connue mercredi, voire jeudi.
Le référé étant suspensif, l'Etat ne peut commencer à faire évacuer le camp. Ce léger décalage ne constitue pas un contre-temps, indique-t-on en substance à la préfecture du Pas-de-Calais. "On poursuit, et même on intensifie les maraudes sociales pour convaincre les migrants que nous avons de meilleures solutions d'hébergement que dans le camp de la Lande" qui "ne peut en aucun cas être un projet de vie", souligne la préfecture.
Depuis septembre, l'Etat a multiplié l'ouverture de Centres d'accueil et d'orientation (CAO), qui accueillent désormais près de 2.700 migrants, venant surtout de la "jungle".
Les associations ne l'entendent pas de cette oreille.
"Il s'agit d'une violation des droits fondamentaux des migrants. Les solutions proposées ne sont pas du tout adaptées à leurs besoins. Il faut qu'ils puissent rester ici en attendant que d'autres solutions soient trouvées", argumente Me Julie Bonnier.
Dans la matinée, la juge Quemener s'est rendue au camp de la Lande, visitant notamment une église et la Centre d'accueil provisoire (CAP), où sont hébergés 1.200 migrants dans des conteneurs chauffés. Elle était suivie par de nombreux migrants, encouragés par des affiches d'une association, traduites en plusieurs langues, à se manifester lors de la visite de la magistrate "pour conserver la jungle".
Dans la partie sud de la "jungle" vivent de 800 à 1000 migrants selon la préfecture, 3.450 selon les associations. Une guerre des chiffres qui traduit de vives tensions entre les deux parties apparues dès l'annonce de ce projet d'évacuation le 12 février. "C'est un terrible retour en arrière!", s'était ainsi emporté Christian Salomé.
- Une étape 'humanitaire' -
L'opération suscite aussi les réserves de la Défenseure des enfants Geneviève Avenard. Elle a critiqué lundi les modalités prévues par l'État pour le déménagement des enfants isolés, se prononçant pour "la création urgente d'un dispositif de mise à l'abri des enfants" concernés.
L'Etat souhaite réduire à terme la population de la "jungle" à 2000 personnes, contre 3700 selon elle aujourd'hui.
Le garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas, interrogé mardi matin par Europe 1, a dit souhaiter appliquer "avec humanité" la protection des personnes. Elles "sont en situation de danger aujourd'hui et donc il faut les sortir de cette boue. Vous avez vu ces images, c'est indigne d'un Etat comme le nôtre".
Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve avait lui aussi tenté de temporiser lundi: cette évacuation, qu'il qualifie de "mise à l'abri", se fera "bien entendu en procédant de façon progressive et en privilégiant à chaque instant le dialogue la persuasion et l'information des migrants".
Il s'est dit prêt à "prendre le temps qu'il faut" pour mener à bien cette "étape humanitaire".
La préfecture du Pas-de-Calais s'était montrée plus ferme vendredi dans l'arrêté "d'expulsion d'office" d'ici au plus tard mardi 20H00, où elle avait évoqué les "exactions" de migrants et indiqué que "passé ce délai" et "à défaut d'avoir quitté les lieux, il sera procédé à l'évacuation (...) si nécessaire avec le concours de la force publique".
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