Lors d'une messe devant une foule très recueillie de dizaines de milliers de personnes sur un stade de San Cristobal de Las Casas, le pape argentin a appelé à demander "pardon" pour l'exclusion dont ont été victimes les peuples indigènes dans l'Histoire.
Reprenant des accents sociaux qu'il avait eus lors de son voyage en Equateur, Bolivie et Paraguay, en juin, le pape a martelé: "Souvent, de manière systématique et structurelle, vos peuples (indigènes) ont été incompris et exclus de la société. Certains ont jugé inférieures vos valeurs, votre culture et vos traditions."
"D'autres, étourdis par le pouvoir, l'argent et les lois du marché, vous ont dépossédés de vos terres ou les ont polluées", a accusé le pape dans une critique acerbe des grandes sociétés multinationales qui exploitent les ressources de la région.
"C'est si triste ! Que cela nous ferait du bien, à tous, de faire un examen de conscience et d'apprendre à dire pardon", a déclaré le souverain pontife lors de cette messe en plein air, devant de nombreuses personnes venues en tenues traditionnelles, des bébés dans les bras.
Jorge Bergoglio en a profité pour lancer un nouvel appel pour la protection de la nature: "Le défi environnemental que nous vivons et ses racines humaines nous touchent tous et nous interpellent. Nous ne pouvons plus faire la sourde oreille face à l'une des plus grandes crises environnementales de l'Histoire", a souligné le pape, parlant dans un décor de collines sauvages.
- 'Bienvenue au pape de la lutte' -
L'ambiance était surchauffée à l'arrivée du pape en hélicoptère. Un prêtre, au micro, faisait répéter à la foule : "Bienvenue au pape de la paix, de la miséricorde, de la lutte ! Vive le pape de l'Eglise des pauvres, de l'Eglise qui naît du peuple, de l'Eglise qui veut des évêques et des prêtres proches du peuple !"
Dans cette région du Chiapas, l'un des creusets de la théologie de la libération au Mexique, le nom de Samuel Ruiz, l'ancien évêque progressiste de San Cristobal, mort il y a cinq ans, a été évoqué devant le pape. Le souverain pontife s'est recueilli devant la tombe de celui que les indigènes surnomme affectueusement "Tatic", le "père de tous" en langue tzotzil, qui a développé dans son diocèse le rôle des diacres et qui fut un temps perçu avec méfiance par le Vatican.
San Cristobal de Las Casas, à 2.200 mètres d'altitude, porte le nom de "Las Casas", en souvenir de l'évêque dominicain Bartolomé de Las Casas, l'un des premiers défenseurs espagnols des droits des Indiens aux XVe/XVIe siècles, en pleine répression des peuples autochtones par les Conquistadores.
Pour la première fois, des textes liturgiques ont été prononcés dans les principales langues indigènes, une volonté expresse du pape François qui a remis le premier décret du Vatican, autorisant la liturgie en langue tzeltal, à un groupe d'indigènes à la fin de la messe.
Des Bibles traduites dans ces langues, fruits d'années de travail, ont été remises au pape.
"Seul Dieu sait si les problèmes qu'a notre peuple pourront trouver des solutions", affirmait à l'AFP Maria, une vieille femme d'origine tzeltal, soulignant que "l'eau, l'électricité, l'hôpital, et parfois même la nourriture" manquent.
Le Chiapas (4,7 millions d'habitants), où est né le mouvement zapatiste, est l'un des états les plus pauvres du pays. 30% de la population ne parle pas espagnol et seulement 58% de ses habitants se déclarent catholiques.
Le pape a déjeuné à l'évêché avec des représentants de familles indigènes, avant de rejoindre dans l'après-midi par hélicoptère la ville de Tuxtla où il a participé à une rencontre sur le thème de la famille dans un stade bondé.
Francis a écouté des récits de mariage et divorce, et celui d'une mère célibataire qui avait hésité avant de choisir de ne pas avorter.
"Vous avez été très courageuse", lui a dit le pape.
La famille est "la base de toute société saine", a déclaré François qui a mis en garde contre les idéologies qui la "détruisent".
Mardi, au quatrième jour de sa visite au Mexique, le pape se rend dans l'Etat de Michoacan (ouest), où des milices d'autodéfense résistent au pouvoir de barons de la drogue.
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