Dans le nord-ouest du pays en guerre, des frappes aériennes, vraisemblablement russes, ont pris pour cible un hôpital soutenu par Médecins sans frontières (MSF) et provoqué la mort de neuf personnes dont un enfant, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Quinze jours après le début, le 1er février, d'une vaste offensive des forces du régime de Bachar al-Assad, soutenues par d'intenses bombardements russes, la situation reste extrêmement complexe et confuse dans la province d'Alep.
L'armée syrienne encercle désormais presque totalement les quartiers rebelles d'Alep, l'ex-capitale économique du pays, et progresse au nord de la ville.
Profitant de l'affaiblissement de la rébellion, les forces kurdes présentes sur le terrain avancent depuis l'ouest de la province et ont pris le contrôle de plusieurs localités aux mains de groupes insurgés, ainsi que de l'aéroport de Minnigh.
Ils menacent désormais de contrôler Tall Rifaat, un des trois derniers grands bastions des rebelles dans la province. Les combats y faisaient rage lundi dans cette petite ville tenue par des islamistes soutenus par la Turquie et l'Arabie saoudite, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Dans cette bataille, les Kurdes ne se sont alignés ni avec le régime ni avec les rebelles: leur objectif est de relier les zones qu'ils contrôlent dans le nord de la Syrie afin de créer une région autonome unifiée, à l'image de leurs frères irakiens.
- La 'ligne rouge' d'Ankara -
Ils veulent surtout "avancer vers le territoire tenu par les ultraradicaux du groupe Etat islamique dans l'est de la province d'Alep", qui est morcelée entre les différents belligérants, a expliqué à l'AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH. Ils cherchent à "connecter" leurs trois 'cantons' d'Afrine, de Kobané et de Jaziré, ce qui représente "une ligne rouge pour la Turquie".
L'artillerie turque bombarde depuis samedi la route à l'ouest de Tall Rifaat pour tenter de couper les renforts des FDS, la coalition formée par les milices kurdes syriennes des Unités de protection du peuple (YPG) et des combattants arabes.
Malgré les appels lancés par Washington et Paris à y mettre fin, le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu a prévenu que ces bombardements allaient se poursuivre, notamment pour empêcher les Kurdes de prendre Azaz, une ville située à une dizaine de kilomètres de la frontière.
"Nous ne laisserons pas Azaz tomber. La (milice des) YPG ne sera pas autorisée à avancer vers l'ouest de l'Euphrate et à l'est (du canton) d'Afrine", a-t-il affirmé lundi.
Pour les Turcs, le Parti de l'union démocratique (PYD) et les PYD, sa branche armée, sont avant tout des organisations "terroristes" liées au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène une rébellion meurtrière en Turquie depuis 1984.
Moscou, qui bombarde la rébellion depuis septembre et soutient les positions kurdes en Syrie, a dénoncé la politique "provocatrice" d'Ankara qui constitue "une menace pour la paix".
- 'Attaque délibérée' -
De son côté, le gouvernement de Damas a condamné dimanche "les attaques répétées de la Turquie" et accusé Ankara d'avoir laissé passer des armes et une centaine de combattants pour renforcer les rebelles.
Ces accusations ont été rejetées lundi par le ministre turc de la Défense Ismet Yilmaz, qui a réaffirmé que son pays n'envisageait pas "d'envoyer des troupes en Syrie".
L'implication grandissante d'Ankara dans le conflit embarrasse les Occidentaux, qui sont à la fois alliés de la Turquie au sein de l'Otan, et des Kurdes, qu'ils considèrent comme la force la plus capable de lutter contre l'EI qui contrôlent une partie de la Syrie et de l'Irak voisin.
La poursuite des combats laissent peu d'espoirs qu'une "cessation des hostilités" puisse intervenir en fin de semaine, comme le prévoit l'accord conclu entre les grandes puissances vendredi à Munich, en Allemagne.
Le président américain Barack Obama a de nouveau demandé ce week-end à son homologue russe Vladimir Poutine de mettre fin aux frappes aériennes russes "contre les forces de l'opposition modérée".
MSF a confirmé qu'un hôpital soutenu par l'ONG avait "été détruit par des bombardements" dans la région de Maaret al-Noomane, dans le nord-ouest du pays en guerre.
"Il s?agit d?une attaque délibérée" qui "prive d?accès aux soins les quelque 40.000 personnes vivant dans cette zone de conflit ouvert", a dénoncé à l'AFP Massimiliano Rebaudengo, le chef de mission de MSF pour la Syrie.
Cette ONG soutient au total 153 hôpitaux en Syrie, dont cinq ont été touchés par des frappes depuis le début de l'année.
Près de cinq ans après le début du conflit qui a fait plus de 260.000 morts, la situation humanitaire est dramatique en Syrie. Elle s'est encore aggravée avec l'offensive du régime dans le nord qui a provoqué l'exode de dizaines de milliers de personnes qui restent notamment bloquées à la frontière turque, espérant jusqu'à présent en vain qu'Ankara les laisse entrer.
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