Le carême, qui a commencé mercredi dernier - dit des cendres -, dure 40 jours sans compter les dimanches, en mémoire du temps passé au désert par le peuple d'Israël (40 ans) et par Jésus (40 jours).
C'est une période de "conversion" consacrée à la prière, à la pénitence et au partage avant Pâques, la fête majeure du calendrier chrétien, celle de la résurrection du Christ (le 27 mars cette année, sauf pour orthodoxes et orientaux).
L'Eglise catholique ne prescrit plus que deux jours de jeûne obligatoire durant le carême, le mercredi des cendres et le vendredi saint, tandis que l'abstinence de viande vaut traditionnellement pour tous les vendredis de l'année.
Mais l'esprit du carême résiste à la sécularisation avec, le vendredi notamment, le choix de pratiques alimentaires allégées, le renoncement à une habitude tenace, une déconnexion des écrans pour certains...
En Seine-Saint-Denis, comme dans d'autres diocèses, un groupe d'une grosse vingtaine de personnes a commencé à se réunir le vendredi pour une opération oecuménique "pain, pomme, prière". La démarche rassemble catholiques, protestants et orthodoxes venus du Blanc-Mesnil, d'Aulnay-sous-Bois, de Drancy, etc. On chante, lit et médite l'Evangile, on présente ses intentions de prière... Puis on se contente d'un déjeuner frugal, fait de pain, de pommes et d'eau claire, avant de se séparer. Chaque participant compense l'économie réalisée par une offrande libre au profit d'une organisation caritative.
"Marcher vers l'essentiel, se débarrasser de l'inutile, c'est peut-être ça, aussi, le carême", dit le Père Franz Lichtlé aux "jeûneurs" réunis dans sa modeste église Notre-Dame de l'Annonciation du Blanc-Mesnil.
Même si ses modalités d'application paraissent plus souples chez les protestants, le carême ne fait pas moins sens pour eux. "La société de consommation nous offre tellement de choses, on peut se perdre... Je pense que le temps de carême nous permet de nous repositionner, de nous poser les vraies questions", confie Esther Mélanie Boulineau, pasteur de l'Eglise protestante unie (EPUdF) à Aulnay-sous-Bois, qui accueillera à son tour les "3P", avec un menu légèrement étoffé.
Beaucoup plus strict et fréquent dans l'orthodoxie, le jeûne n'y commencera que le 14 mars dans le cadre du "grand carême", lors du "lundi pur". Mais un représentant de l'Eglise orthodoxe roumaine est là, aux côtés des catholiques et protestants. "Il est très important de prier ensemble: Jésus voulait l'unité", souligne Grégoire Mois.
- "Ascèse du besoin" -
L'enjeu d'un carême sobre s'invite avec évidence à la table des chrétiens, après les appels à la "conversion écologique" du patriarche de Constantinople Bartholomée et du pape François dans son encyclique "Laudato si'".
"Pendant notre prière et notre échange, c'est revenu plusieurs fois: faire un effort sur soi-même pour soigner un peu mieux cette planète, lui redonner une place essentielle", confie à l'AFP le Père Lichtlé, dont l'ensemble paroissial comprend Le Bourget, ville hôte de la conférence sur le climat (COP21) fin 2015.
Le mouvement oecuménique Chrétiens unis pour la Terre a de son côté reconduit son invitation à un carême "sans viande et sans poisson", et propose sur son site toujours plus de recettes de cuisine végétariennes "faciles et équilibrées".
Le carême écolo peut se traduire par diverses initiatives: "vider sa maison, faire un tri chaque jour, pour désencombrer son esprit comme son environnement matériel", énumère Laura Morosini, qui anime une équipe "paroisse verte" pionnière dans le quartier parisien de Ménilmontant.
"On a toujours vécu le carême. Ce qui est nouveau c'est qu'on le pratique de manière plus communautaire, publique et assumée", estime l'abbé blogueur Pierre Amar, curé dans les Yvelines. Dans sa paroisse de Limay-Vexin, la semaine sainte sera précédée d'une proposition de huit jours "au pain et à l'eau", un jeûne vu comme une "ascèse du besoin et une éducation du désir".
"Il y a quelque chose d'altermondialiste là-dedans", sourit le jeune prêtre, qui résume: "Je vaux plus que ce que je consomme".
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