Contrairement à la veille, les députés sont venus en nombre, surtout à gauche, s'exprimer sur cet article 2 du projet de loi constitutionnelle, principale pomme de discorde. Des socialistes frondeurs aux écologistes en passant par certains députés Les Républicains, la plupart des orateurs ont dit leur rejet d'un "symbole clivant, négatif" avec cette déchéance de nationalité pour les terroristes, et invoqué la France, "patrie des droits de l'Homme". Plusieurs ont dit leur préférence pour une peine d'indignité nationale.
Mais les 29 amendements de suppression de cet article 2 ont été rejetés en début de soirée par 176 voix contre 118, ce qui laisse augurer d'un vote favorable à la rédaction proposée par le gouvernement, qui sera débattue elle en fin de soirée après une interruption de séance.
Soixante députés PS ont voté cette suppression (principalement des membres de l'aile gauche mais pas seulement) alors que 132 ont voté contre. A droite, 30 députés Les Républicains ont voté pour la suppression et 33 contre .
Peu après, les députés ont également rejeté par 145 voix contre 108 l'amendement du député PS Olivier Faure qui proposait de remplacer la peine de déchéance de nationalité par une peine de "déchéance nationale" (privation d'un certain nombre de droits).
Manuel Valls avait dit auparavant son hostilité à toute autre formulation que gouvernementale, qui aurait mis "en cause l'engagement du président de la République pris devant le peuple français dans le cadre du Congrès de Versailles".
Si les nouvelles écritures du texte, qui ne font plus référence à la binationalité notamment, en ont convaincu certains au PS, cette version continue d'être refusée par des élus de tous bord refusant la création d'apatrides.
Le chef du gouvernement a aussi annoncé qu'il demanderait de modifier l'article 1er adopté lundi, sur des points contestés à droite et au centre, pour "mieux constitutionnaliser le contrôle parlementaire" de l'état d'urgence, et revenir sur l'interdiction de dissolution de l'Assemblée sous ce régime d'exception.
- "Ce que veulent les Français, c'est le rassemblement" -
Le Premier ministre avait prévenu mardi matin à huis clos les socialistes que voter contre cette réforme annoncée trois jours après les attentats du 13 novembre reviendrait à "mettre en difficulté le gouvernement et mettre en minorité le président" François Hollande.
En coulisses, certains députés évoquaient des pressions du gouvernement ou du groupe PS. "Il y a des dilemmes pour chacun" entre loyauté et fidélité à des convictions parfois contraires aux voeux de l'exécutif, selon un socialiste.
Les "frondeurs" entendent ainsi voter mardi soir contre l'article sur la déchéance, même réécrit par le gouvernement, et contre tout le projet de révision en l'état, a affirmé leur chef de file, Christian Paul.
"Ce que veulent les Français, c'est le rassemblement. Pas de la gauche, mais le rassemblement de tous", a martelé devant la presse M. Valls, plaidant aussi que "la menace terroriste (est) sans doute encore plus importante qu'avant le 13 novembre".
En cas de nouveaux attentats en France, "on nous demandera des comptes", a aussi argumenté Nicolas Sarkozy devant les députés LR. Le chef du parti et ancien président de la République a notamment défendu à nouveau l'inscription de la déchéance dans la Constitution "pour rester fidèle à nos convictions".
M. Sarkozy s'en est vivement pris à ceux qui "changent d'avis" comme François Fillon, son ancien Premier ministre qui venait d'expliquer "avoir conclu en son âme et conscience que la révision constitutionnelle n'était ni nécessaire ni? utile".
Bilan: "pas de position unanime du groupe" LR, dixit son président Christian Jacob. Une majorité de ses membres devrait cependant voter la révision mercredi, selon plusieurs sources.
Les centristes sont aussi majoritairement favorables au texte, moyennant quelques conditions.
André Chassaigne, patron des députés Front de gauche, vent debout contre le projet gouvernemental, persiste à penser qu'il n'est "pas sûr du tout qu'il y aura une majorité sur le vote de demain".
Les écologistes seront "une majorité à voter contre", pronostique Sergio Coronado (EELV). Leur coprésidente Cécile Duflot a espéré que les parlementaires "résisteront au chantage" de Manuel Valls.
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