L'Espagne s'habitue peu à peu à voir le couple princier s'installer dans la salle d'audience aménagée pour l'occasion dans un bâtiment public, à quelques centaines de mètres d'une prison de la station balnéaire de Palma de Majorque.
Subventions gaspillées ou détournées, fausses factures pour des évènements n'ayant jamais eu lieu, sociétés-écran, emplois fictifs: tels sont quelques uns des ingrédients de cette affaire qui a terni l'image de la royauté au point de précipiter l'abdication du père de Cristina Juan Carlos Ier en 2014 au profit de son fils, Felipe VI, frère cadet de la princesse.
A la tête de l'institut Noos, M. Urdangarin, 48 ans, et son associé Diego Torres sont accusés d'avoir détourné plus de 5,8 millions d'euros de fonds publics attribués entre 2004 et 2007 par les gouvernements autonomes des Baléares et de Valence, alors dirigés par le Parti populaire (PP, droite).
Le premier accusé interrogé - José Luis Ballester, alias Pepote, avait décroché une médaille d'or de voile aux JO d'Atlanta de 1996 avant d'être nommé directeur général des Sports des Baléares en 2003.
Embarrassé par son statut de "repenti", il a d'abord expliqué au tribunal pourquoi, dès 2010, il avait décidé de collaborer avec la justice, en échange d'une réduction de peine. Je voulais faire "connaître ma vérité", a-t-il dit, quand "d'autres continuaient avec leurs mensonges".
Iñaki Urdangarin, il l'avait connu au temps de leur jeunesse et de leur gloire, avant que tous deux décrochent des médailles olympiques, l'un de handball, l'autre de voile. Dès l'été 2003, alors que M. Ballester travaillait déjà pour la région, M. Urdangarin, président de Noos, allait négocier ses premiers contrats avec M. Ballester et le président des Iles Baléares, Jaume Matas.
- 'Budget fictif' -
- "Où avait eu lieu la réunion" entre vous?, demande le procureur.
- "Au palais de Marivent", résidence d'été de la famille royale à Palma, répond le "repenti".
- "Vous aviez joué au padel et parlé ensuite?".
- "Effectivement", dit "Pepote".
M. Urdangarin avait obtenu que la région sponsorise l'équipe cycliste Banesto qu'il représentait à hauteur de 18 millions sur trois ans, puis décroché des contrats en or pour Noos, telle l'organisation d'un congrès Tourisme et Sport de deux jours facturé 1,2 million d'euros.
"Un prix complètement disproportionné" basé sur "un budget fictif", selon le parquet, qui considère que MM. Urdangarin et Torres avaient créé Noos dans "le seul but" de profiter du "prestige social de prétendues actions altruistes" et d'"avoir accès à des subventions".
Jaume Matas - ancien ministre (2000-2003) du gouvernement de José Maria Aznar, déjà condamné à une peine de prison dans une autre affaire de corruption - écoutait depuis le banc des accusés la déclaration de son ex-subordonné.
Selon Pepote, M. Matas prenait, seul, des décisions validées par les faux comptes rendus de réunion d'un comité de direction qui "en fait, ne siégeait pas". Et les contrats étaient conclus sans le moindre appel d'offres.
Selon l'accusation, une grande partie des "fonds obtenus d'organismes publics et de sociétés privées" étaient ensuite transférés par Noos à des entités commerciales appartenant à MM. Urdangarin et Torres. L'une de ces "sociétés-écrans", détenue pour moitié par Cristina, finançait selon le parquet de nombreuses dépenses du couple princier - voyages, travaux ou cours de danse... - ce qui a fait scandale dans l'Espagne en crise.
M. Urdangarin, qui encourt jusqu'à 19 ans de prison, devra écouter d'ici au 26 février, les interrogatoires de 12 autres des 17 accusés, avant que vienne son tour, et que Cristina soit entendue, la dernière.
Entamé le 11 janvier, le procès avait aussitôt été suspendu, le temps pour les trois juges de conclure notamment que la princesse devait bien être jugée pour complicité de fraude fiscale. Déjà bannie de tous les actes officiels de la royauté, elle encourt jusqu'à huit ans de prison.
Le procès doit durer jusqu'au 30 juin.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousA lire aussi
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.