Les arabesques du Ballet national néerlandais mettront à l'honneur dès le 6 février, pour une première à guichets fermés, une icône devenue synonyme de sensualité débridée et, finalement, de trahison fatale.
Née dans le nord des Pays-Bas, à Leeuwarden, Margaretha Geertruida Zelle a été tuée à 41 ans par un peloton d'exécution français, le 15 octobre 1917, après avoir été accusée d'espionnage pour le compte de l'Allemagne lors de la Première Guerre mondiale.
Avant la guerre, elle s'était fait un nom, d'abord dans les salles parisiennes puis à travers l'Europe, repoussant les limites des m?urs victoriennes en se dénudant souvent jusqu'à ne plus porter qu'un voile en soie et une brassière ornée de bijoux.
Avec ses "danses sacrées" orientalisantes, elle est considérée comme une des premières danseuses exotiques de renom.
Pour la première fois, son histoire sera racontée "en pointes": "Je voulais faire un ballet dramatique (...), je cherchais donc un sujet ayant un lien avec la danse", explique Ted Brandsen, directeur du Ballet national néerlandais et chorégraphe du spectacle.
"Mata Hari m'a toujours fasciné. Elle était aussi néerlandaise, beaucoup de personnes l'ignorent", assure-t-il à l'AFP.
- Enigme -
L'idée de créer un nouveau ballet d'envergure a germé quatre ans plus tôt, et lorsque M. Brandsen l'a partagée avec le compositeur britannique Tarik O'Regan, nominé deux fois aux Grammy Awards, le projet a pris son envol.
Deux heures durant, plus de 60 danseurs évoluent avec grâce pour raconter la vie mouvementée de Mata Hari, principalement ses années à Paris, où elle a pris de nombreux amants, dont, paraît-il, le compositeur italien Giacomo Puccini.
"Mata Hari vivait à une vitesse folle, nous voulons raconter sa vie de la même manière", souligne M. Brandsen.
Une garde-robe de plus de 300 costumes, qui ont nécessité trois ans de travail, met en valeur la performance des danseurs classiques, qui incarneront la sensualité de Mata Hari sans érotisme, promet M. Brandsen.
Lors d'une répétition à laquelle l'AFP a eu accès, la Russe Anna Tsygankova enchaîne les pas avec une aisance acquise au célèbre Bolchoï de Moscou.
"Toucher de si près l'histoire de sa vie, c'est une opportunité de mieux la connaître", dit à l'AFP celle qui joue le rôle de Mata Hari. "Elle reste une énigme pour moi. Etait-elle juste une danseuse? Etait-elle vraiment une espionne ou juste une victime des circonstances? Qui peut le dire?"
Après un divorce difficile avec un officier néerlandais, Margaretha Geertruida Zelle est sans le sou. Elle fuit alors à Paris, en 1904, pour commencer une nouvelle vie.
Elle se ré-invente rapidement en "Mata Hari", mot indonésien signifiant "Oeil du Jour", et adopte le style de danse javanais pour ses spectacles érotiques.
- Pour l'argent et le glamour -
Si ses moeurs légères font se lever plus d'un sourcil, la renommée de sa "beauté exotique" se répand rapidement à travers l'Europe.
"Elle est allée à Paris et s'est complètement ré-inventée, c'est ce qui m'intrigue chez elle", assure M. Brandsen. Comme Madonna ou Lady Gaga de nos jours, "elle est devenue célèbre très rapidement".
Alors que sa célébrité commence à faner, la danseuse est à Berlin lorsque la guerre éclate en 1914. Elle est alors recrutée par les Allemands pour espionner en France et en Grande-Bretagne.
Aujourd'hui, beaucoup d'historiens estiment toutefois que l'icône n'a jamais sérieusement espionné mais qu'elle a simplement dit oui aux Allemands pour l'argent... et le glamour.
Mata Hari est arrêtée alors qu'elle tente de rejoindre le front où se trouve son amour de l'époque, un officier russe. La France l'accuse d'être un agent double.
Elle sera exécutée par une froide matinée d'automne à Vincennes.
Son statut d'icône et de femme fatale sera consacré en 1931 lorsque l'actrice suédoise Greta Garbo interprétera Mata Hari dans un film du même nom.
Ted Brandsen et Anna Tsygankova disent raconter l'histoire d'une femme à l'"esprit libre" rattrapée par un monde qu'elle ne comprenait pas.
Le jour de son exécution, elle aurait refusé que ses yeux soient bandés et aurait envoyé des baisers "volants" à ses bourreaux. Selon M. Brandsen, Mata Hari "est morte la tête haute".
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