"Aucune référence à la binationalité ne figurera dans le texte constitutionnel ni a priori dans la loi ordinaire", a affirmé le Premier ministre devant la Commission des Lois à l'Assemblée nationale, en présentant le texte de la révision constitutionnelle décidée par François Hollande après les attentats du 13 novembre.
Cette solution, une subtilité d'écriture qui permet de ne pas "stigmatiser" les binationaux, avait été critiquée en raison du risque de créer des apatrides. Or en parallèle, la France "s'engagera dans la ratification" de la Convention de 1954 interdisant la création d'apatrides, a précisé le chef du gouvernement.
Le respect de cette interdiction laisse entendre qu'en pratique, la déchéance sera limitée aux binationaux, même si en théorie elle concernera tous les Français.
A la sortie du Conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll a souligné que la déchéance promise par François Hollande était maintenue. "L'objectif est le même et en même temps, on tient compte aussi des remarques", a-t-il dit, réfutant tout "recul".
Ce long débat sur la révision constitutionnelle a connu un nouveau coup de théâtre mercredi matin avec l'annonce par l'Elysée de la démission de la garde des Sceaux Christiane Taubira, opposée à la déchéance de nationalité, et son remplacement par l'actuel président de la Commission des lois Jean-Jacques Urvoas. C'est ce dernier qui défendra le texte avec Manuel Valls.
Le chef de file des députés Les Républicains Christian Jacob est resté prudent sur la nouvelle rédaction présentée, jugeant qu'il y "avait quelques points de flou". Les voix de la droite sont indispensables pour avoir la majorité des 3/5e au Congrès en faveur de la révision.
La rédaction initiale de l'article 2 du texte de la révision constitutionnelle, telle que présenté le 23 décembre au Conseil des ministres, prévoyait qu'une "personne née française qui détient une autre nationalité" puisse "être déchue de la nationalité française lorsqu'elle est condamnée pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la Nation".
- "Borné dans le temps" -
Manuel Valls a annoncé mercredi une deuxième évolution, prenant en compte une demande des Républicains et du Front national: la possibilité de condamner à la déchéance de nationalité pour certains délits liés au terrorisme, et pas seulement les crimes terroristes (plus espionnage et trahison).
L'association de malfaiteurs à caractère terroriste, le financement direct du terrorisme ou l'entreprise terroriste individuelle, tous punis d'une peine de 10 ans d'emprisonnement, seraient ainsi intégrés comme cause possible de perte de nationalité française.
Le Premier ministre a aussi annoncé sa volonté d'intégrer de nouvelles mesures dans la loi sur l'état d'urgence: une mesure de "retenue de brève durée" (maximum quatre heures) permettant de garder sur place la personne visée pendant les opérations de perquisition; un régime de saisie temporaire à durée limitée de 15 jours pour des objets lors des perquisitions (des textes en langue étrangère, par exemple); et enfin un "droit de suite", si "la perquisition permet de révéler un autre lieu fréquenté par la personne visée".
Ces mesures s'ajouteraient aux modifications déjà apportées à la loi de 1955 en novembre.
Enfin, Manuel Valls a tenté de rassurer sur la durée de l'état d'urgence, qui restera un "régime d'exception" et "nécessairement borné dans le temps". Le Premier ministre avait jeté le trouble vendredi en affirmant que la France pourrait "utiliser tous les moyens" face au terrorisme "jusqu'à ce qu'on puisse en finir avec Daech".
Il a en revanche exprimé des réserves sur un amendement parlementaire qui limiterait dans le temps, par exemple à quatre mois, la durée maximale de prolongation de l'état d'urgence.
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