Lors de l'audience en référé, le 13 janvier, Aéroports du Grand Ouest (AGO), filiale du groupe Vinci et concessionnaire du futur aéroport, avait demandé l'expulsion immédiate des onze familles et quatre agriculteurs, opposants historiques au projet, assortie d'une astreinte journalière de 200 à 1.000 euros.
Cette mesure d'astreinte, qui aurait pu conduire, si elle avait été décidée, à une asphyxie financière des personnes visées et les contraindre au départ sans intervention des forces de l'ordre, a en revanche été écartée par le juge Pierre Gramaize. "Le principe de l'astreinte n'était pas justifié" car elle est "disproportionnée pour des familles qui ne disposent que de revenus modestes", a-t-il expliqué.
Le juge a néanmoins déclaré que "l'évacuation (pouvait) commencer pour les exploitations agricoles" et pour les familles non concernées par le délai de deux mois accordé à huit d'entre elles.
Un important dispositif de forces de l'ordre était présent lundi autour du palais de justice de Nantes devant lequel étaient rassemblés plusieurs centaines d'opposants à l'aéroport, venus en soutien aux familles et exploitants expulsés, qui ont accueilli le jugement aux cris de: "On ne lâche rien!".
S'exprimant au mégaphone devant les opposants, dont certains grimés en clown, Julien Durand, porte-parole de l'Acipa, principale association d'opposants au projet d'aéroport, a supplié le président de la République: "(François) Hollande, parle enfin, avant que l'irréparable se fasse à Notre-Dame-des-Landes! C'est cette semaine que tu dois prendre la parole!".
- "L?État fera face à ses responsabilités" -
L'avocat des expulsables, s'est néanmoins réjoui de la décision: "ils ont gagné deux mois. Après, l?État fera face à ses responsabilités", a déclaré Me Erwan Le Moigne. "C'est uniquement sur des mesures d'appel à la force publique que ces expulsions pourront se faire et non par la pression financière".
Le rassemblement d'opposants s'est dispersé sans incident.
Le Parti de Gauche par la voix de la secrétaire nationale à l'écologie Martine Billard a dénoncé cette décision dans un communiqué.
La procédure d'évacuation, cruciale pour le projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes, a été relancée après l'annonce, le 30 octobre par l?État, de la reprise des travaux, suspendus depuis 2012.
Depuis la déclaration d'utilité publique en 2008, 244 personnes qui vivaient sur le site ont accepté de partir à l'amiable, rappellent les partisans de l'aéroport.
Mais les agriculteurs, qui ont refusé de vendre leurs terres à l'amiable, et les familles, anciens propriétaires ou locataires de maisons rétrocédées à AGO, pour certaines présentes depuis des générations sur la "Zad" (zone d'aménagement différé, rebaptisée "zone à défendre" par les opposants), ont assuré qu'ils ne "partiraient pas".
Ils sont soutenus depuis début janvier par la reprise des mobilisations contre ce projet de transfert de l'actuel aéroport de Nantes-Atlantique vers le site de Notre-Dame-des-Landes.
Les élus de la commune de Notre-Dame-des-Landes ont voté mardi soir, lors d'un conseil municipal extraordinaire, une motion de soutien aux habitants "historiques", demandant à l?État de "surseoir à toute expulsion".
Les opposants au nouvel aéroport nantais accusent le président François Hollande d'avoir "trahi" son engagement, pris en 2012, de geler les expulsions tant que les recours déposés contre le projet n'auraient pas été épuisés, y compris les appels.
A l'inverse, pour les partisans du projet, collectivités locales en tête, les engagements pris "ont été scrupuleusement respectés", ceux-ci se limitant aux recours déposés avant le 4 mai 2012, date à laquelle l'accord a été signé.
Le transfert de l'actuel aéroport vers le site de Notre-Dame-des-Landes, un projet vieux de plus de 40 ans, devait initialement s'achever en 2017. Depuis une première tentative d'expulsion à l'automne 2012, interrompue pour laisser la place à une "commission de dialogue", le projet est en attente.
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