Sept pièces moulées directement sur le corps de Jean Lambert-Wild, pesant plus de 6 kg mais "qui se portent comme un vêtement" grâce à l'ingéniosité des costumières du Théâtre de l'Union, déclare-t-il.
Il aura fallu au total plus de sept mois de travail pour réaliser cette pièce exceptionnelle, parée de motifs réalisés au "bleu de four", couleur emblématique de la porcelaine de Limoges. Une "folle aventure" dans laquelle le metteur en scène a réussi à embarquer le directeur des porcelaines de La Fabrique, "qui ont mis leurs locaux et moyens à notre disposition".
Habitué des projets insolites, comme des performances en impesanteur dans un avion "zéro gravité", le directeur de théâtre aime inclure dans ses créations les savoir-faire des territoires qui l'ont accueilli. Et il cherchait depuis longtemps à faire monter sur scène la célèbre porcelaine de Limoges.
"Quand j'ai commencé à me plonger dans le texte de Richard III et à me renseigner sur la biographie du personnage, j?ai rapidement été convaincu que la porcelaine serait ici à sa place", dit-il.
- 'Robustesse insoupçonnée' -
Loufoque, une armure de porcelaine pour l'impitoyable tyran bossu dépeint par Shakespeare ? "Il y a quelque chose de très poétique à réaliser une armure, qui symbolise la force, la puissance virile et qui doit protéger le corps, dans un matériau qui, dans l?imaginaire, renvoie à la fragilité, au délicat, au subtil. Pour moi, ce vêtement est une belle interprétation de Richard III: sous la puissance extérieure, on perçoit des fragilités, des failles", explique Jean Lambert-Wild, qui a choisi d'incarner le difforme Richard III sous les traits d'un clown boiteux.
"Sous son apparente fragilité, la porcelaine a en vérité des propriétés techniques et de robustesse insoupçonnées", assure le céramiste Christian Couty, pour qui "on peut à peu près tout faire" avec ce matériau.
Dans les années 1980, il s'était illustré en fabriquant la première robe en porcelaine jamais créée. Christian Couty a de nouveau revêtu sa blouse blanche d'apprenti-sorcier en 2015 pour construire l'armure de Richard III. "Il a fallu avancer pas à pas, apprendre des +ratés+ pour faire coïncider l'ambition esthétique avec les contraintes techniques telles que cuisson, rétractation, solidité... On ne relève pas ce genre de défi sans accepter qu?on va se tromper ou en pensant compter ses heures", raconte-t-il.
Quant aux costumières du théâtre de l'Union, elles ont dû ruser pour permettre au comédien de bouger avec fluidité malgré cette armure rigide. "C'est un costume que je mets et que j'enlève à plusieurs reprises pendant la pièce. Elles ont donc dû tester et inventer plusieurs systèmes de rembourrage pour éviter les frottements mais aussi d?attaches, de telle sorte que l?armure tienne solidement sur moi mais soit facile à poser pendant les changements", explique Jean Lambert-Wild.
A l'issue des dix représentations données à Limoges jusqu'au 29 janvier, la pièce partira en tournée en France et en Europe, et un double de l'armure sera réalisé en cas de "casse" inopinée.
L'armure devrait ensuite être exposée au public dans les vitrines du Musée national Adrien Dubouché de Limoges, entièrement dédié à la porcelaine.
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