Le 14 janvier 2011, après un mois de manifestations réprimées dans le sang, l'homme qui tenait le pays d'une main de fer depuis 23 ans prenait la fuite vers l'Arabie saoudite à la surprise générale, provoquant une onde de choc dans le monde arabe.
Le matin-même, des manifestants avaient bravé la peur pour crier "Dégage" au dictateur sur l'avenue Bourguiba, non loin du redouté ministère de l'Intérieur, dans le centre de Tunis.
C'est sur cette avenue symbolique que sont prévus des rassemblements pour marquer les cinq ans de cette fuite. Ils seront festif comme celui du parti islamiste Ennahda ou protestataire comme celui d'un collectif réclamant la réforme de la loi sur les stupéfiants ("loi 52"), accusée de détruire la vie de nombreux jeunes.
- 'Globalement mitigé' -
L'artère, quadrillée par de nombreux policiers en uniforme ou en civil, est placée sous très haute protection, le pays étant devenu une cible majeure des jihadistes.
Une cérémonie est aussi prévue au palais présidentiel de Carthage en présence d'élus et de représentants de partis politiques, pendant laquelle le président Béji Caïd Essebsi prononcera un discours.
Cinq ans après la chute du régime de Ben Ali, les Tunisiens peuvent s'exprimer librement, l'un des acquis de la révolution.
Cet anniversaire est toutefois assombri par une situation morose, le chômage, la pauvreté et l'exclusion sociale restant prégnants. Ces maux avaient largement motivé la révolution déclenchée par l'immolation d'un vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, le 17 décembre 2010 à Sidi Bouzid (centre-ouest).
Depuis 2011, le pays a été à plusieurs reprises frappé par de sanglants attentats jihadistes et vit aujourd'hui sous état d'urgence. Des dizaines de policiers, de militaires et de touristes étrangers ont été tués ces dernières années.
"Le bilan de la révolution de la liberté, de la dignité et du droit au travail reste globalement mitigé", écrit jeudi Le Quotidien, tandis que La Presse s'inquiète d'un éventuel retour du pays "à la case départ, celle de l'incertitude et de la peur".
"Quoi qu'il en soit, nous marquons aujourd'hui un évènement fondateur pour la réalité et l'avenir de la Tunisie, pour les décennies et peut-être les siècles à venir", juge Al Maghreb.
Pour Le Temps, il faut "insuffler de l'espoir à tous les désenchantés". "Le discours de l'auto-flagellation sape le moral et l'avenir", avertit-il.
- 'Vie digne pour tous' -
Le pays fait figure de rescapé face à la tourmente dans laquelle sont plongés les autres pays du "Printemps arabe", comme la Syrie déchirée par la guerre et la Libye en plein chaos.
La Tunisie a organisé en 2011 et 2014 des élections libres unanimement saluées comme transparentes, adopté une nouvelle Constitution et reçu le Nobel de la paix 2015 par le biais d'un quartette ayant organisé un dialogue entre partis politiques alors à couteaux tirés.
"Nous sommes fiers de l'exception tunisienne qui a ébloui le monde. La Tunisie a rompu sans retour possible avec l'autoritarisme et la tyrannie", a affirmé le Premier ministre Habib Essid dans un communiqué.
"Nous travaillons ensemble pour concrétiser les diverses demandes de la révolution, en particulier la garantie d'une vie digne pour tous", a-t-il ajouté, précisant que "remporter la guerre contre le terrorisme restait une condition essentielle" pour pouvoir se consacrer au développement.
M. Essid vient de procéder à un vaste remaniement ministériel qu'il avait évoqué après un nouvel attentat revendiqué par le groupe Etat islamique le 24 novembre (12 gardes présidentiels tués en plein Tunis). Deux autres attaques d'ampleur, au musée du Bardo à Tunis en mars et contre un hôtel de Sousse en juin, ont fait 60 morts et ravagé le secteur touristique.
La scène politique, elle, est en pleine recomposition depuis que le parti fondé par M. Caïd Essebsi, Nidaa Tounes, se déchire publiquement.
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