Cette garde à vue, toujours en cours à Marseille, ne pourra être prolongée davantage, puisque, dans le cas d'un mineur, elle ne peut excéder 48 heures, a-t-on précisé de source judiciaire.
L'adolescent, un Turc d'origine kurde qui aura 16 ans dans les prochains jours, a dit avoir agi "au nom d'Allah" et du groupe État islamique, selon les autorités. Une enquête a été ouverte à Marseille "des chefs de tentative d'assassinat aggravé en raison d'une appartenance religieuse" et d'"apologie du terrorisme". Le parquet antiterroriste de Paris s'est ensuite saisi de l'affaire.
Inconnu des services de renseignement, sans antécédents judiciaires ni psychiatriques, l'adolescent a été interpellé quelques minutes après l'agression. Issu d'un milieu "classique et normal", ce lycéen bien noté se serait radicalisé "via internet", selon le parquet.
"Je me sens très fatigué, c'est une situation très difficile, c'est quelque chose qu'on ne peut pas imaginer, c'est très dur à vivre", a déclaré à la presse, mardi en milieu de journée, la victime, Benjamin Amsellem, à la sortie du commissariat central de Marseille. Boitant, visiblement très ému et portant une casquette sur la tête, l'enseignant venait de participer à une audition destinée à reconnaître son agresseur.
- 'Regard froid, déterminé' -
"Il n'y a pas de mots qui ont été échangés" au cours de l'agression, qui a eu lieu alors que le professeur se rendait dans son établissement, a relaté son avocat, Me Fabrice Labi. "Il y a simplement des regards, et les regards en disent long parce que c'est un regard froid, déterminé", a-t-il ajouté, évoquant de la part de l'agresseur la "volonté d'aller jusqu'au bout de l'acte, c'est-à-dire de donner la mort". Me Labi avait auparavant déclaré à l'AFP que son client lui avait confié avoir eu "le sentiment" que son agresseur voulait le "décapiter".
"Je lui disais d'arrêter de me frapper, mais il continuait et je ne pensais pas m'en sortir vivant", avait aussi déclaré cet enseignant de 35 ans au journal La Provence.
"On a voulu le tuer parce qu'il est juif, c'est dur, ça fait peur", a commenté l'épouse de l'enseignant, Mazal, interrogée alors qu'elle attendait sa sortie du commissariat central de Marseille. "Aujourd'hui, il a mis sa casquette, et il encourage la communauté à faire comme lui, non pas parce qu'il a peur ou honte d'être juif, bien au contraire, mais pour sa sécurité", a-t-elle déclaré. "Peut-être qu'hier (lundi), s'il avait mis sa casquette, il aurait pu échapper à cette agression."
Cette dernière a été unanimement condamnée, François Hollande dénonçant des actes "innommables et injustifiables" et les Républicains évoquant "un nouvel acte antisémite odieux". Le Conseil régional du culte musulman de Paca a de son côté fustigé "avec la plus grande vigueur cette lâche tentative d'assassinat".
- Rentrée sous surveillance-
L'agression est survenue quelques mois après deux autres visant la communauté juive de Marseille, forte de quelque 70.000 membres sur une population de 855.000 habitants, selon le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), ce qui en fait la deuxième plus importante de France, derrière Paris et sa région, et une des plus nombreuses d'Europe également.
Le 24 octobre, trois juifs et un cantonnier avaient été agressés près d'une synagogue, dont l'un avec un couteau. Leur agresseur, fortement alcoolisé, a été condamné à 4 ans de prison, dont 18 mois avec sursis. Le 18 novembre, un autre enseignant juif avait été agressé avec un couteau, le jour où une femme musulmane voilée avait aussi été molestée, dans un autre quartier.
Depuis les attentats parisiens du 13 novembre, il y a eu "70 poursuites pour des faits connexes de toute nature, des outrages, des menaces, incitations à la haine, un peu d'apologie du terrorisme", a précisé le procureur de Marseille Brice Robin, ajoutant que ces faits visaient "plus" la communauté juive que la communauté musulmane. "C'est beaucoup plus élevé qu'ailleurs", selon M. Robin.
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