De simples amendes "de principe" avaient été requises contre les prévenus lors de leur procès en novembre à Bordeaux, cinquième et dernier - en première instance - du long feuilleton judiciaire Bettencourt.
Pascal Bonnefoy, l'ex-majordome de l'héritière de L'Oréal, était poursuivi pour avoir enregistré sa patronne dans son bureau à son insu, en 2009 et 2010. Ces écoutes avaient été remises à la fille de la milliardaire, puis à la police.
En partie reproduites dans Médiapart et Le Point, puis largement relayés dans la presse, ces écoutes, révélant la santé déclinante de la milliardaire mais aussi des fraudes fiscales et des immixtions politiques, avaient fait basculer un simple conflit de famille en une affaire d'Etat.
Fabrice Lhomme et Fabrice Arfi de Médiapart, Hervé Gattegno du Point, ainsi que les directeurs de publication des deux médias, Edwy Plenel et Franz-Olivier Giesbert (absent au procès de novembre), étaient poursuivis pour de "détention et diffusion de documents portant atteinte à l'intimité de la vie privée".
A l'audience, les prévenus avaient insisté sur le "paradoxe" d'un tel procès, soulignant que ces enregistrements avaient été déterminants pour révéler les abus de faiblesse dont était victime Liliane Bettencourt, aujourd'hui âgée de 93 ans et placée sous tutelle.
Même les avocats de la milliardaire, partie civile au procès, avaient reconnu une certaine incohérence. "Je ne vois pas comment les parties civiles, ayant été bénéficiaires de ce qui a été relayé par la presse, pourraient aujourd'hui venir jouer les procureurs", avait expliqué Me Benoît Ducos-Ader.
Olivier Pelat, tuteur de la vieille dame, avait même demandé la "relaxe" de Pascal Bonnefoy, qui avait fait "ce qu'il fallait faire" pour protéger sa patronne. Quant aux journalistes, avait-il plaidé, "ils ont permis à une vérité d'exister et à un abus de faiblesse de cesser".
"Si nous étions reconnus coupables, nous serions alors victimes d'avoir fait condamner des coupables pour protéger une victime", avait fait observer Hervé Gattegno.
Le fondateur de Mediapart, Edwy Plenel, qui sera présent mardi à Bordeaux, a rappelé que la révélation de faits avait montré "que certains secrets étaient illégitimes" et que leur révélation était nécessaire à une "démocratie vivante".
Dans le premier volet pour "abus de faiblesse", six prévenus condamnés l'an dernier en première instance seront rejugés en appel à Bordeaux en mai 2016.
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