Dans ce contexte difficile, le médiateur de l'ONU en Syrie, Staffan de Mistura, est attendu mardi à Ryad, puis à Téhéran plus tard cette semaine, deux protagonistes majeurs du conflit syrien.
Pour M. de Mistura, "la crise dans les relations entre l'Arabie saoudite et l'Iran est très préoccupante" et pourrait entraîner "une série de conséquences néfastes dans la région", selon un porte-parole.
La Russie, "profondément préoccupée", a indiqué être "prête à soutenir" un dialogue Ryad-Téhéran, deux pôles d'influence dans la région tourmentée du Proche-Orient.
Les Etats-Unis, alliés des Saoudiens mais qui se sont aussi rapprochés des Iraniens depuis l'accord sur le nucléaire conclu en juillet, ont demandé "des mesures positives pour calmer les tensions". Le secrétaire d'Etat américain John Kerry s'est entretenu avec ses homologues iranien et saoudien.
La France, l'Allemagne et la Turquie ont plaidé pour une désescalade après que Bahreïn et le Soudan ont, comme Ryad, annoncé la rupture de leurs relations avec l'Iran. Quant aux Emirats arabes unis, ils ont rappelé leur ambassadeur à Téhéran et réduit les liens diplomatiques.
La nouvelle crise avait éclaté samedi après l'exécution par Ryad du dignitaire chiite Nimr el-Nimr, critique du pouvoir saoudien, avec 46 autres personnes condamnées pour "terrorisme", dont la majorité pour des attentats attribués au réseau extrémiste sunnite Al-Qaïda.
L'exécution a provoqué une guerre de mots entre Téhéran et Ryad et des manifestations de colère des chiites dans plusieurs pays, dont l'Iran où l'ambassade saoudienne et un consulat ont été attaqués, l'Irak, le Liban, Bahreïn, le Pakistan et le Cachemire indien.
Lundi soir, le Conseil de sécurité de l'ONU a "condamné le plus fermement possible les attaques" contre les missions diplomatiques saoudiennes en Iran, sans évoquer l'exécution.
L'Arabie saoudite avait annoncé la veille "la rupture de ses relations diplomatiques avec l'Iran et exigé le départ sous 48 heures" des diplomates iraniens. Elle a décidé lundi d'interrompre ses liaisons aériennes avec la République islamique.
- Manifestations et attaques -
Téhéran a rétorqué en accusant Ryad de chercher à aggraver les "tensions" au Moyen-Orient et en affirmant que la rupture des relations n'effacerait pas l'"erreur stratégique" que fut l'exécution de cheikh Nimr.
Le guide suprême d'Iran, Ali Khamenei, a déclaré "que la main divine vengerait" le cheikh.
Condamné à mort en 2014 pour "terrorisme", "sédition", "désobéissance au souverain" et "port d'armes", cheikh Nimr avait été la figure de proue de la contestation qui avait éclaté en 2011, dans la foulée du Printemps arabe, dans l'Est saoudien où vit la minorité chiite.
A Téhéran, environ 3.000 personnes ont manifesté lundi, huant la famille sunnite régnante d'Arabie saoudite.
En Irak, pays voisin à majorité chiite, des milliers de partisans du chef chiite Moqtada Sadr ont manifesté à Bagdad, appelant leur gouvernement à rompre les relations avec l'Arabie saoudite.
Deux mosquées sunnites en Irak ont été visées par des attentats (un mort), et le muezzin d'une troisième abattu.
La Ligue arabe, à la demande de Ryad, va se réunir d'urgence dimanche sur cette crise.
- Même le sport -
La crise diplomatique a même touché le sport, les clubs saoudiens participant à la Ligue des champions d'Asie ayant demandé à jouer contre les clubs iraniens en terrain neutre, et non en Iran.
Les relations entre Ryad et Téhéran évoluent en dents de scie depuis la révolution islamique iranienne de 1979. Les deux puissances sont le plus souvent en désaccord sur les crises dans la région et s'accusent mutuellement de vouloir élargir leur influence.
Elles avaient rompu leurs relations de 1987 à 1991, après de sanglants affrontements entre pèlerins iraniens et forces saoudiennes lors du hajj à La Mecque en 1987.
Pour les experts, la nouvelle crise risque d'alimenter les guerres par procuration que se livrent Téhéran et Ryad, notamment en Syrie et au Yémen.
L'ambassadeur saoudien à l'ONU Abdallah al-Mouallim a assuré que son pays continuerait à "travailler dur pour soutenir les efforts de paix en Syrie et au Yémen", sur lesquels la crise "ne devrait avoir aucun effet".
Un analyste de l'International Crisis Group, Noah Bonsey, est de l'avis contraire: "Pour obtenir une résolution politique en Syrie, il faudrait que les Etats clés qui soutiennent chaque camp fassent des concessions réciproques, et poussent leurs alliés syriens à faire de même", dit-il. "Pour l'instant, les choses évoluent dans le sens inverse."
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