La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a annoncé lundi avoir saisi le parquet financier des déclarations de patrimoine de Jean-Marie et Marine Le Pen, dont elle doute de la "sincérité" en raison de la "sous-évaluation manifeste" de certains actifs.
La présidente du Front national a aussitôt annoncé avoir déposé un recours devant le Conseil d'Etat contre cette décision, y voyant "une volonté de nuire désormais systématique et outrancière". Son père a dénoncé auprès de BFMTV "le harcèlement des adversaires du gouvernement et de l'establishment".
Dans son communiqué, la Haute Autorité fait part de son "doute sérieux quant à l?exhaustivité, l'exactitude et la sincérité de leurs déclarations, du fait de la sous-évaluation manifeste de certains actifs immobiliers détenus en commun par M. Jean-Marie Le Pen et Mme Marine Le Pen et, par ailleurs, de l?omission de biens mobiliers par M. Jean-Marie Le Pen".
Cette infraction est passible de 45.000 euros d'amende, trois ans de prison et dix ans d'inéligibilité au titre de la loi pour la transparence de la vie publique.
La Haute Autorité s'était intéressée aux déclarations de patrimoine que Jean-Marie et Marine Le Pen étaient tenus de remplir en leur qualité de députés européens.
Elle reproche au dirigeant historique du Front national et à sa présidente actuelle d'avoir sous-évalué leurs actifs respectifs pour environ les deux tiers de leur valeur, soit plus d'un million d'euros pour Jean-Marie Le Pen et plusieurs centaines de milliers d'euros pour sa fille.
Elle a rendu une décision concomitante pour les deux dossiers car certains éléments de leur patrimoine immobilier sont communs, notamment les propriétés de La Celle-Saint-Cloud et de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine).
"Cette évaluation de parts minoritaires de SCI est totalement contradictoire et gravement surévaluée avec celle opérée, depuis de nombreuses années, par l'administration fiscale", assure Marine Le Pen.
Il est en outre reproché à Jean-Marie Le Pen d'avoir omis de déclarer un compte en Suisse et des lingots d'or qui avaient fait l'objet d'une note de signalement de la cellule antiblanchiment de Bercy (Tracfin). Cela a conduit début novembre à la perquisition des bureaux de Jean-Marie Le Pen suite à une plainte pour fraude fiscale aggravée de la part du fisc.
Selon une source judiciaire, le parquet national financier va étudier les éléments transmis par la Haute Autorité pour décider des suites à donner à l'enquête.
- Une conséquence de l'affaire Cahuzac -
La loi sur la transparence, adoptée après la découverte début 2013 du compte bancaire caché à l'étranger de l'ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac, oblige ministres, parlementaires et certains élus locaux à déclarer leur patrimoine, et vise aussi à prévenir d'éventuels conflits d'intérêts.
A ce jour, treize dossiers ont été transmis à la justice par la Haute Autorité, chargée du contrôle des déclarations. Outre les Le Pen, il s'agit de l'ex-ministre de la Francophonie, Yamina Benguigui, de neuf parlementaires (dont les députés Les Républicains Bernard Brochand et Patrick Balkany, ou encore le sénateur LR Serge Dassault) et une élue locale LR, Isabelle Balkany.
Pour l'instant, un seul dossier a fait l'objet d'un jugement, en première instance, celui de Mme Benguigui, déclarée coupable pour des omissions dans ses déclarations de patrimoine et d'intérêts, mais dispensée de peine.
Des juges financiers enquêtent par ailleurs sur le financement du parti d'extrême droite. Dans ce dossier, Marine Le Pen a refusé en octobre et en novembre de se rendre à une convocation des juges. Elle a demandé leur dessaisissement mais sa requête a été rejetée.
Le Front national, qui dénonce un complot politique, a été mis en examen le 9 septembre pour recel d'abus de biens sociaux et complicité d'escroquerie dans cette enquête qui porte notamment sur le financement des législatives de 2012. Les magistrats ont mis en examen sept autres personnes, dont le trésorier du parti d'extrême droite Wallerand de Saint-Just et l'un de ses vice-présidents, Jean-François Jalkh.
Les juges soupçonnent le FN, le microparti Jeanne géré par des proches de Marine Le Pen et l'imprimeur du parti, Riwal, d'avoir mis en place un système d'enrichissement frauduleux avec de l'argent public.
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