L'opérateur téléphonique Orange, héritier du monopole historique en France, s'est vu infliger jeudi une amende-record de 350 millions d'euros pour entrave à "la concurrence sur le marché de la clientèle +entreprise+ depuis les années 2000", une sanction lourde mais négociée.
L'Autorité de la concurrence rappelle qu'elle a infligé au groupe présidé par Stéphane Richard l'amende la plus élevée jamais prononcée pour "une entreprise à titre individuel", et dénonce "des pratiques graves". L'Autorité a été saisie il y a plusieurs années par les concurrents d'Orange, Bouygues Telecom -qui s'est désisté en 2014- puis par SFR.
L'ex-France Télécom est accusé d'avoir abusé de sa position dominante pour fidéliser ses clients professionnels dans les années 2000, au début du boom de la téléphonie mobile. Orange est mis en demeure de cesser ses pratiques immédiatement.
En téléphonie fixe, l'Autorité de la concurrence s'est aussi inquiétée de l'accès privilégié d'Orange aux informations délivrées par la "boucle locale cuivre issue de l'ancien monopole historique". Cette "boucle", en fait le dernier maillon du réseau avant l'abonné, donne des informations capitales dans l'élaboration des offres commerciales.
La sanction, même importante, a cependant des allures de "gentlemen's agreement". Orange, qui a coopéré avec l'Autorité de la concurrence, accepte la décision sans faire appel.
L'amende ne représente même pas 1% de son dernier chiffre d'affaires (plus de 39 milliards d'euros en 2014): "Orange a depuis longtemps passé une provision qui est largement suffisante pour couvrir cette amende et par conséquent ça n'aura aucun impact sur nos résultats de l'année ni bien évidemment sur nos objectifs financiers", a déclaré à l'AFP le PDG d'Orange Stéphane Richard.
Peu avant midi (11H00 GMT), le titre Orange progressait de 3,3% à la Bourse de Paris.
-discrimination dans la téléphonie fixe -
"L'opérateur a accepté une sanction qui ne serait pas supérieure à 350 millions d'euros", indique à l'AFP l'Autorité de la concurrence. "Depuis l'adoption de la loi Macron, l'Autorité de la concurrence a la possibilité de conclure une transaction avec les entreprises. Nous avons anticipé ce nouvel outil juridique en explorant les voies d'un règlement négocié avec Orange".
Cette sanction est la conséquence d'une plainte déposée en 2008 par Bouygues Telecom, puis par SFR deux ans plus tard.
Bouygues Telecom "s'était finalement désisté en avril 2014", précise l'Autorité de la concurrence.
A cette date, les deux opérateurs avaient trouvé un compromis pour solder leurs contentieux. Orange avait accepté d'indemniser les préjudices subis par Bouygues pour quelque 300 millions d'euros, alors que Bouygues lorgnait vers SFR.
D'après l'agence de presse Bloomberg, Orange a récemment entamé des discussions préliminaires pour racheter les activités télécoms et médias de Bouygues, propriétaire de TF1.
Les pratiques de fidélisation d'Orange sur le marché de la téléphonie mobile "ont pu empêcher les entreprises de faire jouer la concurrence et les dissuader de confier une partie de leur parc à un autre opérateur", détaille l'Autorité dans son long résumé de six pages.
Il faut "éviter que les entreprises ne soient captives trop longtemps d'un même opérateur", indique à l'AFP l'Autorité, qui ajoute: "Sur le marché des particuliers, beaucoup de choses ont été faites par la loi, mais peu pour les entreprises qui ont plus de difficultés pour migrer d'un opérateur à l'autre".
Pour les services fixes, Orange est notamment sanctionnée pour "discrimination" envers les autres opérateurs dans "l'accès et l'utilisation d'informations issues de la gestion de la boucle locale cuivre issue de l'ancien monopole historique".
"Nous avons démontré que ces informations sont capitales pour construire des offres à destination des entreprises. Nous avons imposé à Orange un délai de 18 mois pour mettre en place un dispositif informatique qui garantisse une égalité parfaite entre ses propres équipes commerciales et ses concurrents", détaille-t-on à l'Autorité de la concurrence.
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