En acceptant de négocier avec Bachar al-Assad sous la pression de leurs alliés internationaux, les principaux groupes de l'opposition politique et armée syrienne se sont résignés à l'idée d'une solution politique faute de pouvoir renverser militairement le régime, estiment experts et opposants.
Après deux jours de réunion à Ryad, une centaine d'opposants ont donné jeudi leur accord pour des négociations avec le régime tout en demandant le départ de M. Assad au début d'une éventuelle période de transition, une exigence essentielle des rebelles.
Le rassemblement de Ryad, inédit car il a inclus des factions armées, s'inscrit dans le cadre d'un processus international visant à accélérer un règlement politique en Syrie, où la guerre a fait plus de 250.000 morts, poussé à l'exode des millions de personnes et favorisé la montée en puissance du groupe jihadiste Etat islamique (EI).
Ce sont surtout les actes répréhensibles de l'EI qui ont poussé les grandes puissances à agir malgré leurs divergences sur le sort à réserver à M. Assad -les Occidentaux exigeant son départ, la Russie et l'Iran l'appuyant politiquement et militairement.
"Les factions (armées) en particulier et les forces de l'opposition en général ont fait des concessions () L'intérêt général du pays a primé sur celui de telle faction ou telle opposition", déclare à l'AFP Mohammad Bayraqdar, membre du bureau politique du puissant groupe armé islamiste Jaich al-Islam.
- Forcing international -
Pour M. Bayraqdar, le forcing international pour une solution n'a pas laissé d'autre choix à l'opposition.
"Vous ne pouvez pas, en tant que faction, défier la volonté de la communauté internationale () Il est clair qu'il existe aujourd'hui une volonté d'une solution politique" et que le renversement militaire du régime "n'est pas sur la table", dit-il.
Un membre de la Coalition nationale syrienne, principale composante de l'opposition en exil, Mounzer Makhos, a lui aussi relevé que les opposants "ont accepté de négocier et d'adopter des positions souples".
A Ryad, les opposants ont réclamé que "Bachar et sa clique se retirent du pouvoir avec le début de la période de transition" politique.
Mais, souligne M. Bayraqdar, "à Ryad, les opposants ont indiqué que si le régime ne répond pas positivement au principe de base des négociations (le départ d'Assad, ndlr), les nations (soutenant l'opposition) doivent alors leur envoyer des armes" pour le combattre.
Le régime n'a pas encore réagi à l'accord, mais M. Assad dans une interview la veille à l'agence espagnole EFE a affirmé qu'il ne négocierait avec aucun groupe armé, prétextant que toute personne portant une arme est un "terroriste".
"Le communiqué de Ryad veut toujours le départ d'Assad et cela est bien sûr inacceptable pour le régime", explique Thomas Pierret, spécialiste de la Syrie à l'université d?Édimbourg.
Rien ne peut augurer d'une réussite ou même d'une tenue de ces pourparlers, après l'expérience des négociations de janvier-février 2014 en Suisse -les seules entre opposition et régime- qui s'étaient soldées par un échec.
- 'Tout peut déraper' -
Signe d'une fragilité de l'accord, l'un des principaux groupes armés, Ahrar al-Cham, a annoncé son retrait de la réunion de Ryad mais plusieurs sources ont ensuite affirmé qu'il avait finalement signé le communiqué final.
L'accord de Ryad a été annoncé une semaine avant une nouvelle réunion internationale attendue à New York.
Mais le secrétaire d'Etat américain John Kerry a estimé que quelques problèmes demeuraient après cet accord. "Il y a des questions et évidemment, de notre point de vue, des n?uds à démêler", avant la réunion de New York.
Et pour Karim Bitar, directeur de recherches à l'Institut français de relations internationales, les changements de position d'Ahrar al-Cham sont "le premier signe que tout peut déraper". C'est "la forte pression saoudienne qui a favorisé" la conclusion de l'accord.
Durant les négociations à Ryad, le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir est allé voir lui-même les participants qui ont été également reçus par le roi Salmane. En outre, des diplomates de France, des Etats-Unis et de Grande-Bretagne ont été vus dans les couloirs de l'hôtel où se tenait la conférence.
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