La justice américaine veut continuer son grand ménage à la Fifa, où la corruption est selon elle d'un niveau "inconcevable": seize nouveaux responsables, tous latino-américains, ont été inculpés jeudi, dont les deux vice-présidents arrêtés à l'aube à Zurich.
"A chacun des individus coupables qui restez dans l'ombre, en espérant être épargné par cette enquête en cours, sachez que vous ne passerez pas au travers et que vous n'échapperez pas à notre ligne de mire", a menacé la ministre américaine de la Justice, Loretta Lynch, lors d'une conférence de presse à Washington.
"Chacun des 16 nouveaux suspects est inculpé de racket organisé et d'autres infractions liées aux abus commis dans l'exercice de ses fonctions", a ajouté Mme Lynch. Selon elle, "le niveau de trahison de la confiance dans cette affaire est véritablement révoltant et l'ampleur de la corruption présumée est inconcevable".
Fin mai, la justice américaine avait déjà mis en cause 14 personnes (dont 9 membres actuels ou anciens de la Fifa).
Huit suspects ont reconnu leur implication dans le système de corruption à la Fifa visée par cette enquête aux Etats-Unis. Selon Mme Lynch, les pots-de-vin qui ont circulé à la Fifa se montent à quelque 200 millions de dollars depuis 1991.
"Huit suspects ont accepté de plaider coupable pour leur implication dans le système de corruption que nous avons mis au jour", a déclaré la ministre, en précisant que cinq d'entre eux ne figuraient pas dans la première série d'inculpations lancée par les autorités américaines il y a six mois.
- Remake -
Six mois après le début du scandale et les premières arrestations de responsables à Zurich, la Fifa vit donc une nouvelle journée noire en forme de remake. Comme le 27 mai, deux de ses vices-présidents, le Paraguayen Juan Angel Napout et le Hondurien Alfredo Hawit Banegas, ont été cueillis à l'aube dans leur luxueux hôtel zurichois Baur au Lac, à la demande des Etats-Unis. Ils participaient au Comité exécutif de l'instance.
Napout préside la Confédération sud-américaine (Conmebol) et Hawit dirige par intérim la Confédération d'Amérique du Nord, centrale et des Caraïbes (Concacaf), toutes deux au centre des soupçons. Ils s'opposent à leur extradition vers les Etats-Unis.
"Ces cadres haut placés auraient été payés en échange de la vente de droits de marketing en lien avec la diffusion de tournois en Amérique latine et de qualifications pour la Coupe du monde", a détaillé dans un communiqué le ministère suisse de la Justice. La Suisse mène sa propre enquête parallèlement aux Etats-Unis.
Le football brésilien est également frappé de plein fouet par ces nouvelles inculpations. La justice américaine poursuit désormais l'actuel président de la Confédération brésilienne (CBF), Marco Polo Del Nero, et son prédécesseur Ricardo Teixeira, président de la CBF pendant 23 ans jusqu'à sa démission en 2012.
Ces arrestations et ces inculpations ont totalement éclipsé les premières propositions de réforme avancées jeudi par la Fifa pour restaurer sa crédibilité.
Ironie du sort, c'était là l'objet de la réunion du Comité exécutif à Zurich. Autre hasard du calendrier, ces développements judiciaires interviennent au lendemain du cinquième anniversaire de l'attribution du Mondial-2022 au Qatar, entachée de soupçons de malversation et au coeur du tourbillon qui secoue la Fifa.
- Réformes -
Malgré la tempête, les travaux du gouvernement du foot mondial se sont poursuivis comme prévu.
Le principal changement, qui doit encore être ratifié par le Congrès du 26 février, est la limitation à 12 ans des mandats cumulés du président (trois mandats de quatre ans). Le 29 mai, le président Joseph Blatter avait été réélu pour un cinquième mandat, avant de devoir y renoncer sous la pression, dans l'attente des élections du 26 février.
Ces propositions de réformes contenteront-elles les principaux sponsors de la Fifa ? Coca-Cola, McDonald's, Visa, AB Inbev et Adidas ont à nouveau mis la pression mardi en demandant que le processus de réforme soit supervisé par une entité indépendante.
Issa Hayatou, président intérimaire depuis que Blatter a été suspendu jusqu'au 5 janvier 2016, a repris devant les journalistes la formule standard de son prédécesseur: "La Fifa n'est pas corrompue, il y a des individus qui ont fait preuve d'un mauvais comportement."
Le Camerounais de 69 ans a cependant dû se défendre personnellement face à plusieurs questions pressantes.
"Si j'étais corrompu, je ne serais pas là (à la Fifa)", a ainsi lancé le patron du foot africain. En juin, il avait reconnu dans le magazine Jeune Afrique un versement d'"1,8 million de dollars" à la Confédération africaine par les Qataris "pour pouvoir exposer leur projet" (de candidature au Mondial-2022) début 2010.
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