Prolongation des mesures d'exception jusqu'à six mois après la fin de l'état d'urgence, possibilité de déchoir de la nationalité française les binationaux Les contours de la réforme constitutionnelle voulue par François Hollande se dessinent, marquées par un durcissement de l?appareil répressif.
Contrairement à ce qu'affirmaient plusieurs médias et des sources gouvernementales, le projet de révision de la Constitution, transmis mardi pour avis au Conseil d?État et dont l'AFP a obtenu copie jeudi, ne prévoit pas de durée maximale de six mois pour l'état d'urgence.
La règle demeure inchangée: la durée de la prolongation de l'état d'urgence au-delà de douze jours reste fixée par la loi et soumise à un vote du Parlement. Il pourra être prolongé autant de fois que possible, à condition que le Parlement donne son feu vert.
Mais - principale nouveauté - certaines mesures pourront s'appliquer jusqu'à six mois après la fin de l'état d'urgence.
"Lorsque le péril ou les évènements ayant conduit à décréter l?état d?urgence ont cessé mais que demeure un risque d?acte de terrorisme, les autorités civiles peuvent maintenir en vigueur les mesures prises en application (de l'état d'urgence) pendant une durée maximale de six mois. La loi peut permettre, pendant la même durée, aux autorités civiles de prendre des mesures générales pour prévenir ce risque", selon le texte, transmis aux responsables parlementaires.
L'idée est de mettre en place "un régime de sortie progressive de l'état d'urgence", indique-t-on dans l'entourage de Manuel Valls, chargé par le chef de l?État de rédiger ce texte. Ce dernier doit être présenté en Conseil des ministres le 23 décembre après d'éventuelles modifications.
Ainsi, les assignations à résidence décidées durant l'état d'urgence pourront être prolongées jusqu'à six mois après son expiration.
Des "limitations de libertés publiques dans certaines zones", comme des interdictions ou des restrictions de rassemblements ou d'horaires d'ouverture des lieux publics, pourraient aussi être décidées, explique une source gouvernementale.
- Conseil d?État saisi de mesures proposées par la droite -
En revanche, "aucune mesure dérogatoire nouvelle" ne pourra être décidée après la fin de l'état d'urgence.
Les conditions de déclenchement de l'état d'urgence restent d'ailleurs identiques à ce que prévoit actuellement la loi: "Soit en cas de péril imminent résultant d?atteintes graves à l?ordre public, soit en cas d?évènements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique".
En le mettant dans la Constitution, l'exécutif entend renforcer la solidité juridique du régime de l'état d'urgence. Celui-ci, créé par une loi de 1955 au début de la guerre d'Algérie, a déjà été mis à jour et renforcé à la quasi unanimité par le Parlement, à la suite des tueries du 13 novembre.
Une telle réforme constitutionnelle impose, au final, l'approbation d'au moins les 3/5e du Congrès (députés et sénateurs réunis à Versailles), ce qui oblige l'exécutif à obtenir le soutien de l'opposition.
L'autre volet concerne la possibilité de déchéance de nationalité, étendue à tous les binationaux condamnés pour des actes relevant du terrorisme. Jusqu'à présent, seuls les binationaux naturalisés français pouvaient être soumis à cette peine.
"Un Français qui a également une autre nationalité peut, dans les conditions fixées par la loi, être déchu de la nationalité française lorsqu?il est définitivement condamné pour un acte qualifié de crime ou de délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme", selon le projet de texte.
Si la mesure n'était pas inscrite dans la Constitution, elle aurait été contraire au texte suprême, souligne le gouvernement dans l'exposé des motifs de son projet de révision.
Ce dispositif, qui suscite l'embarras de certains députés à gauche, doit notamment permettre d'expulser la personne déchue de sa nationalité française.
Dans sa saisine du Conseil d?État, l'exécutif a également transmis pour avis des mesures proposées par la droite mais dont la légalité pose question.
Le gouvernement veut notamment tester la légalité d'un centre de rétention pour personnes radicalisées mais jamais condamnées "pour des faits de terrorisme", ou à défaut d'un même centre pour les personnes déjà condamnées. Le Conseil d?État doit également se prononcer sur la légalité du placement sous bracelet électronique ou de l'assignation à résidence des "personnes radicalisées et présentant des indices de dangerosité".
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