Les actionnaires du groupe finlandais Nokia ont validé mercredi l'acquisition du franco-américain Alcatel-Lucent, une formalité pour sceller la création d'un géant mondial des équipements en télécoms.
L'assemblée générale extraordinaire à Helsinki a entériné l'opération sans vote. Ceux qui s'étaient exprimés avant avaient dit oui à 99,5%.
Ne reste donc plus qu'à obtenir assez d'actions Alcatel-Lucent, et la fusion sera effective d'ici à fin mars.
La réunion a surtout offert à la direction de Nokia l'occasion de mettre en avant une ambition renouvelée. Les deux groupes doivent redorer un blason terni par des années de difficultés financières.
"Non seulement nos portefeuilles fortement complémentaires, mais nos cultures respectives ont beaucoup de similitudes", a déclaré le directeur général Rajeev Suri. "La logique stratégique reste aussi forte aujourd'hui que le jour où nous avons annoncé la transaction" en avril.
Son groupe, après avoir perdu en 2012 sa place de numéro un mondial des téléphones portables, a vendu deux ans plus tard cette activité qui avait fait sa renommée. Le bon prix qu'il en a tiré (5,4 milliards d'euros) a assaini ses finances, et il concentre aujourd'hui ses forces sur un secteur où il est un compétiteur redouté: la fourniture de logiciels et de services dans les télécommunications.
Alcatel-Lucent, issu d'une fusion dont les résultats ont déçu, avec une seule année de bénéfices depuis 2006, apporte un portefeuille d'activités et clients complémentaire, notamment en Amérique du Nord.
Déjà ouverte à la Bourse de Paris depuis le 18 novembre, et jusqu'au 23 décembre, l'offre (0,55 action Nokia pour une action Alcatel-Lucent) prévoit que les actionnaires de Nokia détiendront 66,5% du groupe fusionné, et ceux d'Alcatel-Lucent le reste.
- Force de frappe -
Dès qu'elle a été annoncée, en avril, elle a été saluée par les analystes financiers. Pour eux, Nokia et Alcatel-Lucent gagneront en force de frappe face aux deux autres poids lourds de cette industrie, le suédois Ericsson et le chinois Huawei.
"À notre avis elle a un sens. Bien sûr chaque transaction présente ses difficultés propres et elle ne sera pas simple, mais il est clair qu'elle apportera l'avantage de la taille", explique Kristian Tammela, analyste de la branche banque privée de Nordea.
Les voix critiques sont venues des syndicats, qui craignent des suppressions d'emploi. Celui des ingénieurs en Finlande a dit redouter les effets du coût nettement supérieur d'un licenciement en France.
Certains actionnaires doutent que tout ira aussi bien que promis. "Ça peut être terriblement difficile, deux grosses entreprises avec une culture différente dans chacune. Comment vont-ils se débrouiller pour les fondre? Ce n'est pas simple du tout", affirmait Reijo Hakonen, retraité finlandais qui avait parcouru 800 km pour être présent dans la capitale.
M. Suri a estimé qu'il y aurait des "synergies" dans certaines activités, surtout les réseaux mobiles. Donc des suppressions d'emplois: "je ne peux pas garantir qu'il n'y aura aucune restructuration", a-t-il souligné.
Mais le président Risto Siilasmaa balaie les craintes en présentant son groupe comme appelé à croître. Une fois achevées début 2016 la fusion et la cession de Here (cartographie et géolocalisation), "plus de 99% de nos salariés, et il y en aura plus de 100.000, seront des gens qui n'étaient pas employés par Nokia il y a trois ans", s'enthousiasmait-il en novembre.
Il excluait du compte les salariés de Nokia Siemens Networks, ancienne coentreprise avec l'industriel allemand Siemens qui constitue le socle du groupe aujourd'hui.
Selon lui, "plus de 95% de notre chiffre d'affaires n'était pas des ventes directes de Nokia il y a trois ans. Toute l'équipe de direction à une exception près est nouvelle, le conseil d'administration est nouveau" par rapport aux années sombres sous la direction du Canadien Stephen Elop.
Ce ne sera qu'une des multiples métamorphoses de l'histoire de Nokia, entreprise papetière à l'origine, qui a fabriqué des pneus, des câbles et des téléviseurs, avant de tout miser sur les télécoms à partir des années 1990.
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