Manuel Valls s'est employé mardi à justifier l'état d'urgence décrété en France après les attentats, face aux critiques qui montent sur une utilisation abusive de ce statut d'exception, notamment autour de la COP21.
Peut-on envisager une prolongation de l'état d'urgence au-delà du 26 février, terme fixé par la loi adoptée après les attentats? "Il ne faut pas écarter cette possibilité bien évidemment, en fonction de la menace", a répondu le Premier ministre sur Europe 1.
Prévue dans le cadre de l'état d'urgence, l'interdiction absolue de manifester sur la voie publique en Ile-de-France, prise après les attentats, a pris fin comme prévu dans la nuit de lundi à mardi. La préfecture de police de Paris peut toutefois encore prendre des mesures ponctuelles comme l'interdiction, annoncée mardi, de manifester autour du Bourget, site de la COP21, et sur les Champs-Elysées jusqu'au 13 décembre.
Pour faire le point sur l'application de l'état d'urgence, les responsables parlementaires - présidents de groupes et des commissions concernées - ont été reçus pendant près de trois heures mardi après-midi à Matignon. Le Premier ministre a défendu devant eux l'efficacité des quelque 2.000 perquisitions et plus de 300 assignations à résidence ordonnées depuis les attentats.
"Ces perquisitions ou les assignations se fondent sur des soupçons objectifs, qui sont étayés", selon M. Valls. "Elles ne sont pas dues au hasard, il ne s?agit pas d?une démonstration de force. Elles sont décidées au vu de renseignements recueillis par les services spécialisés, au vu d?un comportement, ou d?une activité qui peuvent laisser penser qu?il y a une menace".
Un dispositif de contrôle parlementaire de l'état d'urgence va être présenté jeudi par le député PS Jean-Jacques Urvoas, un proche de M. Valls, a confirmé le Premier ministre.
Le chef de file des députés Front de gauche, André Chassaigne, venu avec un "relevé" de manquements constatés, a souhaité relayer des "inquiétudes de la société civile et des organisations syndicales".
58 personnalités ont lancé lundi un appel pour défendre la liberté de manifester pendant l'état d'urgence, tandis que l'avocat Henri Leclerc, président d'honneur de la Ligue des Droits de l'homme, a jugé "préoccupante" la prolongation de l'état d'urgence.
La semaine dernière, Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV), s'était insurgée contre la mise en cause de "militants de l'écologie" qui se sont retrouvés assignés à résidence, souhaitant que "soit examiné l'ensemble des raisons qui ont conduit à ces assignations et perquisitions".
- "Rien à voir avec l'écologie" -
Lors des questions au gouvernement, le sujet est revenu à plusieurs reprises.
Interrogé sur les incidents lors du rassemblement dimanche place de la République en marge de la COP21, qui ont débouché sur plus de 300 interpellations, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve s'est emporté et s'est défendu de toute défaillance de l'Etat.
Assurant avoir "pris toutes les précautions", Bernard Cazeneuve a souligné qu'avaient été décidées avant cette manifestation "26 assignations à résidence, non pas contre des militants écologistes, mais des casseurs".
Bernard Cazeneuve a récemment annoncé une circulaire pour rappeler aux préfets que les perquisitions administratives devaient être effectuées "dans le respect du droit".
L'état d'urgence autorise les perquisitions sans l'aval d'un juge et l'assignation à résidence de personnes jugées dangereuses pour l'ordre public.
Pour Jean-Luc Mélenchon, c'est "un instrument de plus pour criminaliser les mouvements sociaux"$.
"On ne peut pas se payer le luxe d'avoir des casseurs en plein Paris, alors que les forces de l'ordre sont mobilisées par la sécurité après les attentats et par la COP21", a rétorqué mardi une porte-parole des députés PS, Annick Lepetit.
Manuel Valls a reconnu mardi "une restriction des libertés", mais précisément "pour protéger nos libertés". Il a également reconnu que "des leçons" devraient "sans doute" être tirées des attentats, mais qu'il n'y en avait pas "à donner" aux services français.
Quant la révision constitutionnelle visant à inscrire l'état d'urgence dans la Constitution, le chef de file des députés Les Républicains, Christian Jacob, a demandé si le texte serait présenté avant Noël en Conseil des ministres. "Manuel Valls a été prudent" mais a laissé entendre que c'était plutôt l'objectif, a dit M. Jacob à l'AFP.
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