En prenant le contrôle du fabricant du Botox, Allergan, Pfizer a repris la main dans la course à la taille que se livrent les géants pharmaceutiques sur fond d'expiration des brevets et peut préparer sereinement la scission de ses médicaments plus anciens.
Connu pour son traitement contre les troubles de l'érection Viagra, Pfizer a annoncé lundi qu'il allait se marier avec Allergan, basé en Irlande, pour 160 milliards de dollars.
Les avantages fiscaux de ce mariage, qui doit encore recevoir le feu vert des autorités de la concurrence, sont évidents puisque le taux d'imposition de la nouvelle entité sera de 17 à 18% contre 26,5% actuellement pour Pfizer.
Cette union va surtout "transformer l'industrie pharmaceutique mondiale, en créant un numéro un mondial à travers la plus grosse fusion du secteur de l'histoire", avance Gustav Ando, analyste chez IHS Life Sciences.
Elle "renforce la position, déjà excellente, de Pfizer en terme de compétitivité dans le secteur pharmaceutique à forte marge, ajoutant un bon nombre de produits solides et en développement à son portefeuille", souligne de son côté l'agence de notation Standard & Poor's.
La nouvelle entité Pfizer-Allergan devient la sixième plus grosse capitalisation boursière mondiale, pesant un peu plus de 312 milliards de dollars en Bourse, avec un chiffre d'affaires combiné de 61,5 milliards de dollars contre 58 milliards au suisse Novartis jusqu'ici leader mondial de la pharmacie.
Outre le Botox, le portefeuille de la nouvelle entité comprendra le traitement contre les troubles de l'érection Viagra, l'anti-inflammatoire Celebrex ou encore l'anti-cholestérol Lipitor.
- Grandes manoeuvres -
Cette fusion intervient en pleine redistribution des cartes dans le secteur pharmaceutique et replace Pfizer au centre de l'échiquier, alors que des observateurs appelaient le groupe américain à relancer sa compétitivité en perte de vitesse face à l'offensive des sociétés de biotechnologies comme Gilead Sciences et ses médicaments onéreux contre l'hépatite C.
Elle "booste" la division comprenant les nouveaux traitements de Pfizer, estime Jeffrey Holford du cabinet Jefferies. Ceux-ci comprennent les vaccins de la famille Prevnar contre les infections invasives (pneumonie) et des anti-cancéreux (Ibrance contre le cancer métastatique, Xalkori contre le cancer du poumon ou encore Palbociclib contre le cancer du sein) prometteurs. Leur chiffre d'affaires combiné s'est élevé à 6,75 milliards de dollars au troisième trimestre, soit 56% des revenus totaux.
Il ne fait pas de doute que la croissance de cette division va s'accélérer puisqu'Allergan va apporter ses produits dermatologiques, ses traitements dans l'esthétique médicale, et ses traitements ophtalmologiques (médicaments contre le glaucome, la sécheresse oculaire, maladies de la rétine) et contre les troubles gastroentériques (incontinence )
Pfizer a par ailleurs désormais plus de coudées franches pour décider de l'avenir de ses médicaments anciens, affectés par l'expiration des brevets ou en passe de l'être, qu'il va regrouper avec ceux d'Allergan dans la gynécologie notamment. Il a désormais le choix entre les céder ou les coter séparément.
"On s'attend à ce que Pfizer prenne une décision sur une potentielle séparation pas plus tard que fin 2018 pour une opération effective dès 2019", calcule Alex Arfaei chez BMO Capital Markets.
La séparation des produits matures permettrait à Pfizer de se focaliser sur les nouveaux traitements aux marges plus attractives et réduire ses coûts, affirme l'analyste.
Pfizer avait décidé l'an dernier qu'il ne se déferait pas avant 2017 de ses médicaments anciens, dont le chiffre d'affaires annuel de 25,15 milliards de dollars représentait en 2014 56% des ventes totales du groupe. Mais les génériques font mal: pour le seul troisième trimestre 2015, les revenus générés par les médicaments anciens ont plongé à 5,22 milliards de dollars, soit 43% du chiffre d'affaires total.
Hormis Pfizer, d'autres grands groupes pharmaceutiques mondiaux, en quête d'une meilleure rentabilité via des rachats, des échanges d'actifs et des cessions de portefeuilles de médicaments arrivés à maturité, ont réorganisé récemment leurs activités.
Le suisse Novartis a échangé certains actifs avec le britannique GlaxoSmithKline (GSK), tout en vendant sa division de santé animale à l'américain Eli Lilly. Les laboratoires Merck et Sanofi réfléchissent à vendre des portefeuilles de médicaments anciens représentant plusieurs milliards de dollars. Pfizer s'est déjà séparé de son activité de santé animale et d'aliments pour nourrissons, rebaptisée depuis Zoetis.
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