Au lendemain de la prise d'otages meurtrière dans un hôtel de Bamako, le président malien a appelé samedi à une vigilance accrue face à la menace terroriste alors que son pays est en proie depuis près de quatre ans aux attaques jihadistes.
Selon une source de sécurité malienne, "trois suspects qui pourraient être impliqués dans l'attaque" sont activement recherchés.
Depuis vendredi soir, l'état d'urgence est en vigueur pour dix jours dans l'ensemble du pays, qui observera à partir de lundi un deuil national de trois jours en mémoire des victimes de cette attaque contre l'hôtel Radisson Blu de Bamako.
L'assaut a été revendiqué par le groupe jihadiste Al-Mourabitoune de l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, qui dit avoir agi "avec la participation" d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Il a été mené une semaine après les attentats qui ont fait 130 morts à Paris, revendiqués pour leur part par le groupe Etat islamique (EI).
La France est engagée militairement au Mali depuis janvier 2013, au déclenchement d'une intervention internationale impliquant désormais plusieurs pays sous mandat de l'ONU, contre des groupes jihadistes.
"Nulle part dans le monde aujourd'hui, on est à l'abri de ces barbares d'un autre temps", a déclaré le président malien Ibrahim Boubacar Keïta à l'issue d'une visite au Radisson Blu, où demeurait déployé un important dispositif de sécurité. "La +valeur vie+ leur est inconnue, () vous comme nous devrons faire attention."
Vendredi soir, il avait annoncé que l'attaque avait fait 19 morts, sept blessés et que deux assaillants avaient été tués. Un bilan confirmé samedi par le ministre de la Sécurité intérieure, le colonel Salif Traoré, et son collègue de la Défense, Tièman Hubert Coulibaly, lors d'une conférence de presse commune.
Au total, a dit le colonel Traoré, il a été dénombré parmi les morts "18 clients, deux terroristes" et un gendarme malien. Bilan "définitif" selon lui.
Vendredi, une source militaire malienne avait parlé à l'AFP d'au moins 27 morts parmi les quelque 170 résidents et employés de l'hôtel et d'"au moins trois terroristes tués". "Nous avons emmené 27 corps de l'hôtel", a assuré samedi à l'AFP une source policière malienne, sans être en mesure de fournir de détails.
Quatorze étrangers sont pour l'heure identifiés parmi les morts : six Russes, trois Chinois, deux Belges, une Américaine, un Sénégalais et un Israélien, selon des autorités de leurs pays respectifs. L'attaque a suscité une vague de condamnations au Mali, dans la région et à l'étranger.
Le chef de l'Etat sénégalais Macky Sall, également président en exercice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) se rendra dimanche à Bamako pour "présenter ses condoléances" au peuple malien, selon la présidence sénégalaise et l'ambassade du Sénégal sur place.
- Stigmates des violences -
Après s'être calfeutrés chez eux vendredi en raison de l'attaque, de nombreux Bamakois avaient renoué samedi avec leurs activités habituelles.
Un renforcement discret de la sécurité était cependant constaté devant certaines mairies et banques. Il était plus important aux environs de certains hôtels, selon des journalistes de l'AFP et des résidents.
Des ex-otages sont retournés samedi récupérer leurs effets personnels au Radisson Blu, affichant les stigmates des violences de la veille: impacts de balles sur les murs, traces sur les murs ou par terre, débris de verre jonchant le sol dans le hall. Plusieurs douilles de balles ont été récupérées sur place par les forces de sécurité.
Tambakoye Diarra, un employé, a assuré avoir discuté avec des vigiles blessés selon lesquels les assaillants "ne sont pas venus en voiture, ils étaient à pied", et raconté comment lui-même a aidé les forces maliennes - appuyées par des Français, des Onusiens et des Américains - "à infiltrer l'hôtel" pour en évacuer les otages.
D'après des témoignages de diverses sources, les assaillants sont entrés dans l'enceinte de l'hôtel au même moment qu'une voiture munie d'une plaque diplomatique, avec un numéro attribué à l'ambassade des Etats-Unis.
Dans un entretien diffusé samedi soir par la télévision publique malienne ORTM, l'ambassadeur américain à Bamako Paul Folmsbee a précisé que le véhicule, un 4x4, n'était en aucune manière impliqué dans l'attaque. Son chauffeur, qui s'était rendu à l'hôtel pour chercher un Américain, a été surpris par les assaillants et a couru se mettre à l'abri, y abandonnant le véhicule.
Plusieurs Bamakois interrogés par l'AFP ont exprimé stupeur, incompréhension ou peur après l'attaque du Radisson, survenue après un assaut similaire en août dans un hôtel à Sévaré, près de Mopti (centre), qui a fait 13 morts.
Auparavant, en mars, le premier attentat anti-occidental à Bamako, visant un bar-restaurant, avait coûté la vie à cinq personnes, dont un Français et un Belge. Un attentat déjà revendiqué par Al-Mourabitoune.
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