Moins d'une semaine après les attentats, l'Assemblée s'apprêtait jeudi à voter le texte prolongeant pour trois mois l'état d?urgence et modifiant ce régime d'exception, "réponse d'une France forte" au terrorisme selon Manuel Valls, mais source d'inquiétudes de certains pour les libertés.
Le projet de loi de prorogation de l'état d'urgence en métropole et outre-mer jusqu'à fin février, qui devrait être adopté à une très large majorité, passera ensuite entre les mains des sénateurs en vue d'une adoption définitive dès vendredi.
"C?est la réponse d?une France forte, qui ne plie pas, et qui ne pliera jamais. C?est la réponse rapide d?une démocratie, face à la barbarie", a plaidé le Premier ministre, devant un hémicycle quasi comble et dans une ambiance lourde.
A la mi-journée, les députés ont voté l'article premier du projet prévoyant la prolongation de trois mois, durée que la droite et le centre auraient souhaité allonger et les écologistes raccourcir.
Après un vif débat, les députés ont adopté aussi un amendement de dernière minute du gouvernement sur le recours au bracelet électronique pour contrôler certains assignés à résidence, qui ne va pas toutefois aussi loin que ce que proposaient Les Républicains et l'UDI.
Annoncé lundi par François Hollande, le projet de loi, qui actualise aussi la loi de 1955 sur l'état d'urgence, prévoit notamment l'élargissement des assignations à résidence et la dissolution de groupes radicaux chapeautant des mosquées et des lieux de prières extrémistes. Après les attentats, il se veut la première étape avant une réforme constitutionnelle espérée dans les trois mois pour instaurer un "régime civil de crise".
Evoquant une "guerre nouvelle" et l'"imagination macabre" des donneurs d'ordre des attentats, Manuel Valls a appelé à ne "rien exclure", évoquant "le risque d'armes chimiques ou bactériologiques".
Alors que les ministres de l'Intérieur des pays de l'Union européenne se réunissent vendredi à Bruxelles, il a aussi insisté sur le besoin d'adopter le "Passenger Name Record" (PNR) afin "de garantir la traçabilité des déplacements y compris à l?intérieur de l?Union" européenne.
En présence du ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve et de la ministre de la Justice Christiane Taubira, M. Valls a en outre annoncé la création d'une nouvelle structure pour "jeunes radicalisés", dont le site sera "choisi d?ici la fin de l?année" et dont les premiers admis pourront être "des repentis".
- "Risque pour les libertés fondatrices" -
Par ailleurs, les policiers pourront être armés en permanence, y compris hors service, sur la base du volontariat et en prévenant leur hiérarchie, selon une note provisoire de leur direction publiée jeudi.
Les députés socialistes, 15 des 18 écologistes, les députés Front de gauche, les radicaux de gauche, mais aussi l'UDI et Les Républicains ont annoncé leur soutien au projet de loi, un peu modifié en commission mercredi, notamment pour prévoir un contrôle du Parlement et supprimer la possibilité de justice militaire pendant l'état d'urgence. Une cinquantaine d'amendements ont été déposés pour la séance.
"Aucun d'entre nous n'aura d'hésitation au moment de voter ce texte qui sort radicalement de l'ordinaire", mais entend ne pas "céder à la tentation de l'arbitraire", a déclaré le rapporteur, Jean-Jacques Urvoas (PS).
Dans les rares voix à s'élever contre, l'écologiste Noël Mamère a dénoncé le "virage sécuritaire pris par le président de la République" et le "risque pour les libertés fondatrices".
"Nous n'allons pas nous excuser" de prolonger l'état d'urgence et la restriction provisoire des libertés qu'il implique, a lancé Guillaume Larrivé (LR). "La législation de l'état d'urgence ne répond que très partiellement aux défis majeurs", selon Jean-Christophe Lagarde pour l'UDI.
Il faut "conjurer la tentation du régime autoritaire et d'une France du repli et de la fermeture", a prévenu François de Rugy pour les écologistes, tandis qu'André Chassaigne pour le Front de gauche estimait que "le caractère exceptionnel de la tragédie de vendredi () a justifié ce que nous pouvons appeler une légalité exceptionnelle".
L'action de la majorité est marquée du "triple sceau de l?efficacité, de la célérité et de la conformité à nos principes et à nos valeurs", a jugé Bruno Le Roux au nom des députés socialistes, demandant aussi "de ne céder à aucune restriction de la liberté de la presse".
Le vote de l'Assemblée sur l'ensemble du texte n'est pas attendu avant le début d'après-midi.
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