Neuf personnes ont été tuées dans un quartier d'opposants du sud de Bujumbura quelques heures avant le début d'opérations de désarmement forcé "maison par maison" dans le nord de la capitale du Burundi, alors que la communauté internationale redoute des violences ethniques à grande échelle.
Dans ce contexte tendu, le président rwandais Paul Kagame a lancé une charge virulente contre son voisin burundais, accusant ses dirigeants de "massacrer" du "matin au soir" leur population, dans un discours prononcé vendredi dont l'AFP a eu connaissance dimanche.
Dimanche à l'aube, des centaines de policiers ont encerclé le quartier contestataire de Mutakura, dans le nord de Bujumbura - déserté par ses habitants - où ils procèdent à des fouilles systématiques, selon des témoignages.
"La police a commencé l'opération de recherche des armes cachées par Mutakura", a déclaré le maire de Bujumbura Freddy Mbonimpa, ajoutant que "cela se fait professionnellement car les policiers utilisent des détecteurs d'armes".
Le président Pierre Nkurunziza avait donné à ses opposants jusqu'à samedi soir pour "déposer les armes" en échange d'une amnistie, après quoi la police pourrait "user de tous les moyens".
En outre, le maire de Bujumbura, a fait état de sept morts dans un bar au sud de la capitale dans la nuit. Des hommes armés "ont tiré" sur des personnes qu'elles ont obligé à se coucher à terre "froidement". "C'était vraiment une exécution", a déclaré le maire.
Le bilan de cette attaque a grimpé à neuf morts, selon des sources médicales, deux blessés ayant succombé à leurs blessures.
- 'Attaque ignoble' -
"A part cette ignoble attaque dans ce bar de Kanyosha, cette nuit a été très calme dans la mairie de Bujumbura", a assuré M. Mbonimpa.
Le maire de Bujumbura a reconnu toutefois que "les quartiers contestataires, surtout ceux situés dans le nord, se sont pratiquement vidés de tous leurs habitants".
Pris de panique, les habitants des quartiers de Mutakura et Cibitoke, où ont eu lieu des manifestations anti-gouvernementales et où l'on recense chaque jour plusieurs morts, ont fui dimanche matin à l'arrivée des forces de l'ordre.
Marie, une quinquagénaire de Mutakura, "n'a pas fermé l'oeil de la nuit".
"Je pensais à mon mari resté à Mutakura, qu'il allait mourir et même qu'ils allaient nous pourchasser jusque dans ce quartier", a-t-elle déclaré depuis un quartier plus calme, où elle a trouvé refuge avec ses enfants.
"Les gens sont totalement paniqués, certains terrorisés, et cette peur se nourrit des rumeurs d'attaques de la police et des Imbonerakure (ligue jeune du parti au pouvoir, considérée comme une milice par l'ONU) qui ont été confortés par les discours incendiaires des autorités", explique un analyste burundais.
Au moins 200 personnes sont mortes depuis la fin avril, et quelque 200.000 ont fui le pays depuis le début de la crise.
- "Les cadavres jonchent les rues" -
La présidence a tenté samedi de rassurer la communauté internationale qui redoute des violences ethniques à grande échelle, assurant qu'il n'y aurait ni "guerre" ni "génocide" au Burundi.
Alors que les relations entre le Rwanda et le Burundi sont au plus bas, le président Kagame a ajouté que "les gens meurent tous les jours (au Burundi), les cadavres jonchent les rues".
Bujumbura accuse Kigali de soutenir ses opposants, voire de servir de base arrière à une rébellion naissante.
Le Rwanda s?inquiète du retour depuis plusieurs mois d'une possible présence de rebelles hutu des FDLR au Burundi, dont certains membres sont accusés d'avoir activement pris part au génocide au Rwanda en 1994 et d'éventuels massacres ethniques à grande échelle chez son voisin.
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