De l'Oklahoma à l'Ohio, de la Californie à la Virginie, rien ne va plus dans les "chambres de la mort" américaines: en cause, la pénurie des produits d'injections létales, de surcroît accusés de tuer sans épargner la douleur.
Cette controverse touche la majorité des 31 Etats qui appliquent la peine capitale et favorise le déclin général du nombre d'exécutions aux Etats-Unis, en baisse globale depuis 1999.
La polémique s'illustre mardi dans le Missouri: Ernest Johnson, un Noir de 55 ans, doit y être exécuté à 18H00 locale (00H00 GMT mercredi). En 1994, il avait frappé à mort trois employés d'une station-service.
Le condamné souffre d'une tumeur à évolution lente aux méninges, qui a fait l'objet d'une ablation chirurgicale partielle en 2008.
Ses avocats assurent qu'en raison de sa pathologie, M. Johnson va endurer une souffrance "intolérable" quand il se verra administrer une perfusion de pentobarbital, un puissant barbiturique déprimant le système nerveux central, dont certaines zones cérébrales.
Le 8e amendement de la Constitution américaine bannit les "peines cruelles ou inhabituelles". Concernant M. Johnson, un tribunal a toutefois jugé que, le condamné ne proposant aucune solution alternative rapidement opérationnelle, son exécution aurait bien lieu par injection. Il s'agira de la 26e exécution de l'année aux Etats-Unis.
L'homme risque donc d'ajouter son nom à la liste des exécutions "ratées" depuis janvier 2014, où figurent Dennis McGuire, décédé dans l'Ohio après 25 longues minutes qui l'ont vu suffoquer, Clayton Lockett, qui a succombé dans l'Oklahoma au bout de 43 minutes de râles et convulsions, ou Joseph Wood, dont l'agonie a duré deux heures en Arizona.
Au-delà de ces cas qui ont choqué l'opinion publique, la situation s'est aggravée depuis le refus de firmes pharmaceutiques, pour la plupart européennes, d'approvisionner les Etats-Unis en produits mortels.
La pénurie qui dure depuis plusieurs années a conduit certains Etats à se tourner vers des préparateurs en pharmacie non homologués par la FDA, l'Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux.
"Nous savons que les Etats contournent la loi et font affaire avec des sociétés pharmaceutiques de réputation douteuse", assure à l'AFP Dale Baich, un avocat spécialisé dans les peines capitales.
- Foire aux produits -
D'autres Etats, dont l'Arizona ou le Nebraska, ont selon des médias américains tenté d'acheter en catimini en Inde du thiopental, un barbiturique.
"Le problème durera tant que les Etats continueront à garder le secret sur la source des produits utilisés dans les injections létales", estime Dale Baich.
Les révisions de protocoles de mise à mort, introduisant de nouvelles substances, ont par ailleurs donné une impression d'improvisation. On a vu surgir davantage de cas de surdosage, d'intolérance aux hypnotiques, voire d'erreurs manifestes.
Début octobre, l'Oklahoma a reconnu avoir exécuté un condamné par de l'acétate de potassium, au lieu de chlorure de potassium.
La Californie, de son côté, est engluée dans un débat sans fin sur l'efficacité d'une injection avec un seul produit mortel, par rapport à un protocole comptant trois substances.
Quant à la Virginie, elle a dû quémander du très rare pentobarbital au Texas, l'Etat américain qui exécute le plus, afin de mettre à mort le mois dernier un assassin récidiviste.
D'autres Etats, en rupture de stock ou paralysés par des actions judiciaires, ont de facto suspendu leurs exécutions.
Le 10 octobre, un juge a suspendu huit exécutions dans l'Arkansas, en donnant raison aux condamnés qui exigeaient de savoir quels produits mortels on allait leur injecter.
Le 19 octobre, l'Ohio a lui décidé de reporter toutes ses exécutions capitales jusqu'en 2017.
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