La défense d'Oscar Pistorius a tenté mardi, lors du procès en appel du champion paralympique sud-africain, de convaincre des juges très pugnaces de ne pas renvoyer en prison le jeune homme, qui a abattu chez lui sa petite amie en 2013.
Pistorius, qui avait acquis une stature internationale en s'alignant parmi les valides aux Jeux Olympiques de Londres en 2012, a été condamné en 2014 à cinq ans de prison pour "homicide involontaire". Il a cependant bénéficié d'une libération anticipée le 19 octobre 2015 et se trouve actuellement en résidence surveillée chez son oncle à Pretoria.
Le parquet sud-africain, qui a fait appel du jugement, tente d'obtenir une condamnation pour "meurtre" (ou homicide volontaire), un crime passible d'une peine d'au moins 15 ans de prison. S'il est reconnu coupable de meurtre, Pistorius retournera donc derrière les barreaux.
L'audience de près de trois heures mardi, retransmise en direct à la télévision sud-africaine, a donné lieu à des échanges très musclés entre les juges et la défense, qui a semblé à plusieurs reprises déstabilisée. L'interprétation faite en première instance par la juge Thokozile Masipa a été au coeur des débats.
En Afrique du Sud, la procédure d'appel s'apparente en effet plus à la cassation française qu'à un appel proprement dit. Aucun témoin n'est appelé à la barre: la Cour suprême d'appel ne se prononce pas sur le fond, mais sur le droit uniquement.
"L'analyse du meurtre (faite par la juge de première instance) semble erronée", a lancé mardi le juge Eric Leach de la Cour suprême d'appel de Bloemfontein (centre de l'Afrique du Sud). "Quand il (Pistorius) a tiré, savait-il qu'il y avait quelqu'un derrière la porte (des toilettes)?"
Pour l'accusation, la réponse ne fait aucun doute: "En tirant à travers une porte à hauteur d'homme dans un petit espace (), il est prévisible que quelqu'un va mourir", a souligné le procureur Gerrie Nel.
"Voici un homme qui se tient sur ses moignons", a répondu l'avocat de la défense, Barry Roux. "Il est vulnérable (). Il pensait sincèrement qu'il était en danger et c'est la raison pour laquelle il a tiré".
- Jugement mis en délibéré -
Pistorius, amputé des deux jambes, a toujours plaidé l'erreur tragique. Il affirme qu'il a cru qu'un cambrioleur avait fait irruption dans sa salle d'eau dans sa maison ultra sécurisée de Pretoria.
Ténor du barreau, Barry Roux, retors lors du procès en première instance, s'est trouvé en difficulté mardi pour soutenir sa thèse. A plusieurs reprises, il a bégayé et interrompu son argumentaire pour se plonger longuement dans ses notes.
Pistorius, qui n'est pas apparu en public depuis sa sortie de prison, n'était pas présent mardi à Bloemfontein, ce qui est normal à ce stade de la procédure.
En revanche, la mère de la victime Reeva Steenkamp avait fait le déplacement. "Je suis ici pour soutenir Gerrie Nel et son équipe", a expliqué June Steenkamp à l'AFP.
La Cour a mis en délibéré son jugement, qui sera rendu à une date ultérieure.
Trois options s'offrent à elle. Elle peut soit rejeter l'appel, ce qui permettrait à Pistorius de continuer à purger sa peine chez son oncle. Elle peut aussi requalifier le crime en "meurtre" et laisser le soin à la Haute Cour de prononcer une nouvelle condamnation. Elle peut enfin décider d'un nouveau procès.
Si la Cour suprême d'appel opte pour le meurtre, Pistorius, 28 ans, pourrait retourner en prison dans les 48 heures.
A l'issue de l'audience mardi, le parquet s'est dit confiant. "Nous pensons que le ministère public a présenté des arguments très convaincants et irréfutables, et par conséquent nous avons bon espoir que l'appel sera accepté", a déclaré le porte-parole du parquet, Luvuyo Mfaku.
L'affaire continue de passionner l'opinion en Afrique du Sud. A Bloemfontein mardi, un de ses supporters brandissait une pancarte "#Pas touche à Oscar Pistorius".
"Il doit être condamné à la prison à vie. Même s'il est célèbre, il faut que la loi s'applique", affirmait de son côté une féministe, Khosi Mojapi.
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