Neuf jours après leur rocambolesque évasion de Saint-Domingue, où ils avaient été lourdement condamnés pour trafic de drogue, les pilotes Pascal Fauret et Bruno Odos ont été rattrapés par la justice française et placés en détention lundi en vue de leur comparution.
Pascal Fauret a été placé en détention provisoire après avoir été entendu à Lyon par le juge des libertés et de la détention (JLD). Bruno Odos a été écroué après avoir été entendu à Grenoble. Les deux hommes doivent être transférés à Marseille pour être entendus par la juge d'instruction qui enquête sur le volet français de ce vaste trafic de drogue transatlantique, surnommé "Air Cocaïne"
Les gendarmes se sont présentés tôt lundi aux domiciles de Pascal Fauret, 55 ans, dans la banlieue de Lyon, et de Bruno Odos, 56 ans, en Isère, munis du mandat d'amener de la juge Christine Saunier-Ruellan, qui instruit le dossier depuis février 2013.
Ils sont arrivés chez Pascal Fauret à 07H00, a confirmé à l'AFP son avocat, Jean Reinhart, "surpris" par la procédure choisie par la juge.
"Le mandat d'amener était inutile, c'est pour faire du spectacle", a-t-il jugé, rappelant que son client, et l'autre pilote, Bruno Odos, avaient "dit à la juge et ensuite publiquement qu'ils étaient disposés à se rendre à une convocation" de la justice.
Un mandat d'arrêt international a été lancé contre les deux pilotes par la République de Saint-Domingue.
Après l'évasion, Paris a toutefois écarté l'hypothèse d'un renvoi des deux hommes en République dominicaine.
"On était à la disposition de la juge d'instruction. Nous l'avions prévenue dès qu'ils ont mis un pied en France. Franchement je ne pensais pas qu'on allait avoir la police à la maison", a déclaré l'épouse d'un des deux pilotes, Sabine Fauret, "scandalisée".
"Je suis révolté, je suis atterré", a réagi Me Eric Dupond-Moretti, avocat de Bruno Odos. "On avait demandé qu'on nous convoque, mais il a fallu que les mauvaises habitudes l'emportent."
- Opération d'exfiltration rocambolesque -
Pascal Fauret et Bruno Odos étaient les pilotes d'un Falcon 50 intercepté en mars 2013 à l'aéroport de Punta Cana à bord duquel se trouvaient deux autres passagers, les Français Nicolas Pisapia et Alain Castany.
A bord de l'avion, affrété par une société de location, SN-THS, basée à Bron (Rhône), se trouvaient 680 kg de cocaïne répartis dans 26 valises, selon les autorités dominicaines.
Les quatre Français, condamnés en août 2015 à Saint-Domingue à 20 ans de prison, avaient été laissés libres en attendant leur procès en appel.
Des proches ont alors organisé dans le plus grand secret une opération d'exfiltration des deux pilotes, par bateau puis par avion, leur permettant de regagner la France fin octobre. Les deux autres Français sont restés à Saint-Domingue.
Dans le volet français de l'enquête, dès janvier 2013, les gendarmes avaient été alertés de "comportements suspects" de passagers d'un Falcon 50 ayant atterri un mois plus tôt à Saint-Tropez.
Le 9 décembre 2012, un douanier en poste à Toulon, soupçonné aujourd'hui de complicité, était allé accueillir l'avion, avec à son bord Pascal Fauret, Bruno Odos et Nicolas Pisapia. Il avait fait entrer sur le tarmac deux véhicules qui avaient emporté dix valises déchargées de l'appareil.
Selon l'enquête, deux autres déchargements identiques avaient eu lieu en 2012 et un autre était prévu le 18 mars 2013.
Un homme d'affaires, Franck Colin, a reconnu avoir affrété l'avion et a été placé en détention. Également incarcérés, les deux patrons de la SN-THS, ont depuis été libérés sous contrôle judiciaire.
Au cours de l'enquête Air Cocaïne, la juge s'était penchée de manière incidente sur trois vols affrétés auprès de SN-THS pour le compte de l'ancien président, Nicolas Sarkozy, par la société de son ami Stéphane Courbit.
Selon le Journal du dimanche, la juge avait par ailleurs demandé la géolocalisation du téléphone de M. Sarkozy et les factures détaillées de ses communications. L'avocat de M. Sarkozy, Me Thierry Herzog a demandé "des explications".
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