Le parti du président islamo-conservateur turc Recep Tayyip Erdogan va pouvoir s'atteler seul à la formation d'un gouvernement après sa victoire écrasante aux élections législatives anticipées, où il a retrouvé sa majorité absolue perdue en juin.
Le Parti de la justice et du développement (AKP) de M. Erdogan a déjoué tous les pronostics dimanche: sur la quasi-totalité des bulletins dépouillés, il a recueilli 49,4% des suffrages et raflé 316 des 550 sièges de députés, ont annoncé les chaînes NTV et CNN-Türk dans la nuit.
Pour le président Erdogan, c'est une revanche après un revers retentissant: le 7 juin, son parti avait perdu le contrôle total qu'il exerçait depuis 13 ans sur le Parlement et remisé son rêve d'instaurer une "superprésidence".
Dans la nuit, le Premier ministre sortant Ahmet Davutoglu, lors d'un traditionnel discours au siège de l'AKP à Ankara, a appelé à l'unité - dans un pays désuni et inquiet.
"Il n'y a pas de perdants dans ce scrutin, la Turquie entière a gagné", a-t-il assuré devant des milliers de partisans, affirmant que le prochain gouvernement défendrait les acquis démocratiques: "Les droits des 78 millions d'habitants sont sous notre protection".
Le président Erdogan a estimé dans un communiqué que le peuple turc a "clairement exprimé" () qu'il préférait le service et les projets à la polémique" et "fait preuve d'une forte volonté en faveur de l'unité et de l'intégrité" de la Turquie.
Autre surprise, le Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde), entré triomphalement au Parlement en juin, ne dépasse que de justesse le seuil minimal de représentation (10,7%, soit 59 sièges). Ces résultats ont provoqué de brefs affrontements dimanche soir entre forces de l'ordre et jeunes militants kurdes à Diyarbakir, grande ville du Sud-Est à majorité kurde.
- 'Peur de l'instabilité' -
Selon les résultats officieux, le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate) est arrivé deuxième avec 25,4% des voix et 134 sièges, devant le Parti de l'action nationaliste (MHP, droite) avec 12% et 41 sièges, en fort recul.
La quasi-totalité des sondages créditait l'AKP de 40 à 43% des intentions de vote, score insuffisant pour gouverner seul.
"Le peuple a le gouvernement qu'il mérite" et "s'accommode très bien de la situation actuelle", a réagi Sevim, étudiant en droit de l'université d'Istanbul, "complètement effondré".
"La peur de l'instabilité en Turquie, ajoutée à la stratégie d'Erdogan se posant en +homme fort qui peut vous protéger+, l'ont emporté", a commenté l'analyste Soner Cagaptay, du Washington Institute.
Depuis les législatives du 7 juin, le climat politique s'était considérablement alourdi en Turquie.
En juillet, le conflit opposant les rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) au pouvoir turc (près de 40.000 morts depuis 1984) a repris dans le Sud-Est, enterrant le fragile processus de paix engagé il y a trois ans.
M. Erdogan y a fait référence dans son communiqué, affirmant que "le résultat des élections a livré un important message pour le PKK. L'oppression et l'effusion de sang ne peuvent coexister avec la démocratie".
L'attentat-suicide perpétrée il y a trois semaines à Ankara par deux kamikazes proches du groupe Etat islamique (EI), qui a fait 102 morts, a en outre ravivé la peur de la violence jihadiste venue de la Syrie voisine en guerre.
- Election 'injuste' -
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