TF1 a jeté son dévolu sur Newen, la société qui produit le feuilleton "Plus Belle la Vie", irritant un des meilleurs clients du producteur, France Télévisions, qui a riposté en suspendant leur collaboration.
TF1 et Newen ont annoncé jeudi être "en négociation exclusive" "afin de nouer un partenariat dans le domaine de la production et de la distribution de droits audiovisuels", un nouveau coup d'éclat dans la course aux contenus que se disputent les groupes de médias.
"Dans cette perspective, TF1 pourrait prendre une participation majoritaire dans Newen", ajoute le document. Aucune indication sur les modalités ou le montant de la transaction n'a été communiquée.
Si une telle prise de contrôle se concrétisait, TF1, premier groupe privé de télévision gratuite en France (chaînes TF1, TMC, NT1 et HD1), détiendrait à travers sa filiale les droits des grandes fictions de l'audiovisuel public.
France Télévisions a répondu "fermement" jeudi soir en annonçant la suspension de ses projets avec Newen.
"Nous contestons que les investissements de France Télévisions, principalement financés par la contribution des citoyens par la redevance, puissent aujourd'hui faire l'objet d'une telle tractation commerciale", a déclaré France Télévisions, rappelant que "les deux tiers du chiffre d'affaires de Newen" sont réalisés avec le groupe public.
Outre "Plus belle la vie", Newen produit pour les chaînes publiques les fictions "Candice Renoir", "Le Sang de la Vigne", des magazines et des jeux comme "Harry", "Le magazine de la Santé" ou "Les maternelles".
Le ministère de la Culture avait appelé plus tôt à ce que "l'indépendance éditoriale (de Newen) soit garantie, notamment au regard de ses liens avec le service public".
La rue de Valois voit par ailleurs favorablement ces rapprochements "qui renforcent et structurent le secteur de la production audiovisuelle tricolore. Alors que ce fleuron français était voué à un rachat étranger, il trouve dans notre pays les moyens de se développer et de rayonner à l'international".
La société, qui propose actuellement plus de 1.300 heures de programmes par an au sein de ses 4 filiales Telfrance, Capa, Be Aware et 17 juin Media, distribue ses productions dans plus de 80 pays, à l'instar de "Versailles", sur la vie de Louis XIV, la série la plus chère de l'histoire de la télévision française.
"Le rachat d'un producteur européen est une bonne nouvelle pour le groupe TF1, estime le courtier parisien Gilbert Dupont. Ce dernier va pouvoir diversifier ses revenus dans la production mais également à l'international".
Fort d'une trésorerie estimée à plus de 730 millions d'euros, TF1 a enfin décidé de s'appuyer sur ce trésor de guerre important pour mener à bien cette ambition.
- Champions mondiaux -
Troisième producteur français, Newen aurait généré un chiffre d'affaires d'environ 200 millions d'euros, selon Gilbert Dupont, citant "certains articles de presse".
Cette annonce stratégique, qui intervient au lendemain de l'annonce de l'arrivée en février de Gilles Pélisson à la tête de TF1, pour remplacer Nonce Paolini, "laisse certainement des marges de manoeuvre pour d'autres opérations", analyse Philippe Bailly, du cabinet d'analystes NPA.
Cette opération est surtout un signe supplémentaire de la volonté des grands groupes audiovisuels comme TF1 de renforcer leurs moyens de production de contenus, nouveau nerf de la guerre des médias.
Pour les producteurs comme Newen, s'associer à un grand groupe montre la nécessité de disposer de davantage de moyens, sur fond de rapprochement entre acteurs du secteur, pour faire émerger des champions européens, voire mondiaux.
Vivendi, propriétaire de Canal+, a ainsi annoncé début septembre vouloir prendre une prise de participation minoritaire dans le groupe qui naîtra de la fusion des sociétés de production européennes Banijay et Zodiak, futur troisième groupe mondial de création de programmes.
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