Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a défendu jeudi l'efficacité de sa politique visant à étanchéifier la frontière à Calais (Pas-de-Calais) en affirmant que "plus un migrant" n'avait réussi à gagner illégalement la Grande-Bretagne depuis dimanche.
"Depuis le 25, il n'y a plus un migrant qui passe en Grande-Bretagne" depuis Calais, a affirmé M. Cazeneuve lors d'une audition devant l'Assemblée nationale, en soulignant qu'en une semaine "on est passé de 1.300 à 241 intrusions" ou tentatives quotidiennes dans le tunnel sous la Manche à Calais (Pas-de-Calais).
Cette annonce intervient le jour d'une audience au tribunal administratif de Lille, saisi par deux ONG qui espèrent contraindre l?État à prendre "des mesures d'urgence" sur le bidonville de Calais, où quelque 6.000 migrants sont installés en espérant passer en Grande-Bretagne.
"Le jeudi 22 octobre il y a eu 1.300 intrusions ou tentatives d'intrusions dans le tunnel, le 23 octobre 1.040, lundi 464 et cette nuit 241", a précisé M. Cazeneuve. Cette baisse a une conséquence sur les interceptions, passées de 606 le 22 octobre à 3 dimanche.
"Nous mobilisons nos forces pour bien envoyer le message aux passeurs que l'on ne passe plus à Calais", a assuré M. Cazeneuve, qui avait annoncé le 21 octobre l'arrivée à Calais de 460 gendarmes et CRS supplémentaires, portant à 1.125 les effectifs sur place.
Il a par ailleurs défendu la pratique de placement de migrants en situation irrégulière en centre de rétention administrative (CRA), à Coquelles (Pas-de-Calais) ou ailleurs si ce centre est saturé. "Si ces étrangers, au terme des vérifications qui correspondent à l'application de la loi, sont éloignables ils le sont, sinon ils sont bien entendu libérés", a-t-il affirmé.
M. Cazeneuve a toutefois qualifié de "mensonge" l'idée qu'il soit procédé à l'éloignement de migrants "avec des jets privés". "Il n'y a pas de jets, mais depuis 2006 l'utilisation de moyens aériens dans le cadre d'un contrat de location", avec un appareil Beechcraft ayant permis l'éloignement de 382 personnes en 2012 et de 502 en 2014, pour un coût de 1,7 million d'euros en 2012 et de 2,3 millions en 2014 - soit 4.100 euros par étranger éloigné en 2015.
- Tribunal lundi -
M. Cazeneuve a par ailleurs défendu la politique de "multiplication des maraudes" sur le bidonville, pour "inciter les migrants à demander l'asile en France", qui a abouti à "près de 2.000 demandes" en 2015.
Soulignant le "volontarisme sans précédent" en matière d'asile à Calais et les délais d'instruction des demandes "très courts", le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) Pascal Brice s'est de son côté félicité de voir des migrants partir en "centres d'accueil" pour réfléchir à cette démarche.
Après 300 personnes mardi, "plusieurs centaines" quitteront le bidonville vendredi "et cela va se poursuivre de manière organisée", a-t-il affirmé à l'AFP, assurant qu'"une solution humanitaire durable n'est pas possible au vu du nombre de personnes présentes sur place".
Ces centres font partie du volet humanitaire annoncé la semaine dernière, avec l'augmentation jusqu'à 400 des places d'hébergement pour femmes et enfants au centre d'accueil Jules-Ferry.
Mercredi, de premières mesures sanitaires ont aussi été mises en oeuvre, avec notamment l'arrivée d'un médecin, d'un psychologue et d'un kinésithérapeute en renfort de Jules-Ferry.
Mais deux ONG (Médecins du monde et le Secours catholique-Caritas), pas convaincues, ont attaqué l'Etat en justice pour obtenir des mesures d'urgence (points d'eau, toilettes, bennes à ordures). Le tribunal administratif de Lille se prononcera lundi.
Cette action des deux associations intervient après la rupture de dialogue spectaculaire d'Emmaüs, qui, début octobre, avait dénoncé "l'inertie malsaine" du gouvernement, et dans le sillage d'un rapport très critique du Défenseur des droits Jacques Toubon, parlant d'"atteintes aux droits fondamentaux" sur le campement.
Dans un mouvement de mobilisation inédit jusqu'alors, 800 artistes et militants viennent aussi de demander un "large plan d'urgence" dans un "appel de Calais".
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