Une "évasion" mais pas une initiative "barbouzarde": les deux pilotes lourdement condamnés pour trafic de cocaïne en République dominicaine ont refusé de dévoiler les conditions de leur retour rocambolesque en France et s'en remettent désormais à la justice française.
S'exprimant pour la première fois en public depuis sa fuite, Pascal Fauret a expliqué avoir voulu "retourner dans (son) pays" pour s'"exprimer devant la justice", car il estime avoir été condamné à Saint-Domingue "pour la seule raison" qu'il est Français. "Il y a des épreuves à venir", "je sais que ça va être long", a-t-il reconnu lors d'une conférence de presse à Paris.
C'est par bateau puis par avion, via les îles de Saint-Martin et de la Martinique, que Pascal Fauret, 55 ans, et son copilote Bruno Odos, 56 ans, condamnés à 20 ans de prison mi-août 2015, ont fui pour regagner la France durant le week-end, selon une source proche du dossier.
"Leur décision est un acte individuel dans lequel l'Etat n'est nullement impliqué", a assuré le Quai d'Orsay.
Cette "évasion" n'a "pas été faite seule", "des gens sont impliqués", a admis un de leurs avocats, Eric Dupond-Moretti, mais ce n'est pas l'entreprise "d'une équipe barbouzarde qui aurait été payée par l'Etat français". Selon lui, leur départ "ne constitue absolument pas une infraction" en France.
Un autre de leurs avocats, Jean Reinhart, a demandé que ses clients, tous deux anciens de l'Aéronavale reconvertis dans le civil, "puissent être entendus rapidement" par la juge d'instruction chargée à Marseille de l'enquête française, ouverte après l'interception en 2013 d'un avion bourré de cocaïne en République dominicaine. Une dizaine de personnes sont mises en examen notamment pour importation de stupéfiants en bande organisée dans ce volet marseillais, dont les deux pilotes.
"Leur avocat a pris contact avec la juge d'instruction", a confirmé le parquet de Marseille, qui a promis de prochaines "décisions".
- Inquiétudes pour deux autres Français -
L'affaire remonte à la nuit du 19 au 20 mars 2013, quand la police dominicaine intercepte sur le tarmac de l'aéroport de Punta Cana un Falcon 50 avec 26 valises contenant 680 kilos de cocaïne à son bord.
Le 14 août 2015, les pilotes ont été condamnés, avec deux autres Français, le passager, Nicolas Pisapia, et l'apporteur d'affaires Alain Castany, restés en République dominicaine, à 20 ans de prison par le tribunal de Saint-Domingue. Quatre Dominicains ont écopé de cinq à dix ans de prison.
Les quatre Français, qui ont effectué 15 mois de détention provisoire, n'ont cessé de clamer leur innocence, plaidant qu'ils ne savaient pas que de la drogue se trouvait à bord de l'avion. Les pilotes expliquent n'avoir "jamais été auditionnés par les Dominicains" et dénoncent une parodie de justice.
Après leur condamnation, ils sont restés libres dans l'attente de l'examen de leur appel, mais avaient interdiction de quitter la République dominicaine.
Le sort des deux Français restés sur place en liberté surveillée préoccupe, notamment celui d'Alain Castany, qui risque une amputation après avoir été "fauché par une moto" à Saint-Domingue, selon son avocat qui a demandé son rapatriement.
"Le départ de Bruno Odos et Pascal Fauret ne peut que polluer toute démarche auprès des autorités dominicaines pour obtenir son rapatriement en France, a expliqué sur Europe 1 son avocat, Karim Beylouni, précisant que son client n'avait pas été "tenu informé de l'entreprise de ces deux pilotes".
Nicolas Pisapia n'a pas non plus été tenu au courant, selon son avocat Julien Pinelli, "et n'avait de toute façon pas les soutiens nécessaires pour mettre en oeuvre une telle entreprise". "Il est à craindre que les autorités dominicaines décident de m'incarcérer à nouveau", a témoigné son client sur iTÉLÉ.
Plusieurs personnalités politiques comme les députés Christian Kert (Les Républicains), Jean-Pierre Maggi (PS) ou Sergio Coronado (EELV) craignent également une "détérioration" des conditions de vie de Nicolas Pisapia et Alain Castany.
"Depuis le départ, on a été noyé dans la dénomination +les quatre Français+ mais ce n'était pas un vol de copains", s'est défendu Pascal Fauret. "A un moment donné, j'ai géré ma vie à moi."
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousA lire aussi
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.