Le gouvernement turc a accéléré sa "guerre contre le terrorisme" à cinq jours d'élections législatives cruciales pour son avenir, en multipliant les coups de filet contre les militants jihadistes sur son territoire et en frappant les combattants kurdes en Syrie.
Mardi à l'aube, la police antiterroriste turque a mené une vaste opération dans plusieurs districts de la ville conservatrice de Konya (centre) et interpellé 30 membres présumés du groupe Etat islamique (EI), ont rapporté les médias turcs.
Lors de deux autres raids similaires, les forces de l'ordre ont arrêté 21 autres suspects à Istanbul et 20 à Kocaeli (nord-ouest), a précisé l'agence de presse Dogan.
Ces descentes spectaculaires interviennent au lendemain d'une fusillade qui a tué deux policiers et neuf membres présumés de l'EI à Diyarbakir, la principale ville du sud-est à majorité kurde de Turquie. Cet accrochage est le plus sérieux survenu en Turquie depuis qu'Ankara a rejoint la coalition antijihadiste l'été dernier.
L'état-major de l'armée a par ailleurs annoncé mardi avoir arrêté 17 personnes présentées comme proches de l'EI qui tentaient de franchir illégalement la frontière près d'Elbeyli (sud) pour se rendre dans une zone de Syrie tenue par les jihadistes.
Depuis quelques jours, la police turque a intensifié ses opérations contre la mouvance jihadiste à l'approche des législatives qui auront lieu dimanche sous haute tension, après l'attentat suicide attribué aux jihadistes qui a fait 102 morts le 10 octobre à Ankara.
Le président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan et le Premier ministre sortant Ahmet Davutoglu font campagne pour le scrutin du 1er novembre en jouant la carte de la sécurité et de l'unité du pays sur le mode "nous ou le chaos".
Lundi encore, le chef de l'Etat a promis de continuer la lutte contre "toutes les organisations terroristes" qui menacent la Turquie.
Mardi, la police a ainsi interpellé 13 militants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) à Elazig (est). Depuis trois mois, les rebelles kurdes ont repris leur campagne d'attentats ciblés contre les forces de sécurité turques, faisant voler en éclats les discussions de paix engagées depuis l'automne 2012.
- 'Menace kurde' -
M. Davutoglu a également confirmé lundi soir que l'armée turque avait frappé "à deux reprises" récemment les positions des combattants kurdes de Syrie.
"Nous avions prévenu que le PYD (Parti de l'union démocratique, Kurdes de Syrie) ne devait pas franchir (une limite) au-delà de l'ouest de l'Euphrate et nous avons frappé à deux reprises", a déclaré M. Davutoglu.
Les Unités de protection du peuple (YPG), la milice du PYD, avaient dès lundi accusé Ankara d'avoir visé leurs positions pendant le week-end.
Le gouvernement turc s'inquiète depuis des mois de la progression dans le nord de la Syrie des forces kurdes, proches du PKK qui mène la rébellion depuis 1984 en Turquie. Il redoute notamment qu'elles ne profitent de la guerre civile en cours pour y proclamer une région autonome le long de sa frontière sud.
"C'est une menace pour nous", a répété samedi M. Erdogan.
Soutenues par les Etats-Unis, les milices kurdes syriennes constituent le fer de lance des forces terrestres engagées contre l'EI en Syrie. Après la ville emblématique de Kobané en janvier, elles ont pris en juin le contrôle de celle de Tall Abyad.
"Avant les élections, le pouvoir turc veut démontrer qu'il ne baisse pas les bras contre les terroristes, c'est avant tout une démonstration de force", a commenté à l'AFP Serkan Demirtas, le chef de bureau du journal Hürriyet Daily News à Ankara.
M. Erdogan et son Parti de la justice et du développement (AKP) espèrent reconquérir dimanche la majorité absolue perdue lors des législatives de juin dernier, après treize ans de domination politique sans partage sur le pays.
Depuis l'attentat d'Ankara, son camp fait l'objet des vives critiques de l'opposition, qui l'accuse de "protéger" les mouvements jihadistes qui luttent contre le régime de Damas.
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